Re: Méditation avec Les saintes voies de la Croix du M. Henri-Marie Boudon
Posté : 14 décembre 2022, 15:18
CHAPITRE V
De la perte de l'honneur
Ce qui faisait encore beaucoup, pour donner vogue à ces discours, était la conduite de ses disciples. Voyez-vous, disait-on, ce ne sont pas seulement des gens qui lui sont opposés, qui agissent contre lui : l'un de ses propres disciples l'a livré à nos pontifes, marque de la connaissance qu'il en avait.
Celui qui paraissait le plus zélé d'entre eux, a trouvé sa vie si honteuse, qu'il n'a pas même osé dire devant une simple servante qu'il le connaissait, et a mieux aimé se parjurer que de dire qu'il était de sa suite. Tous les autres l'ont abandonné :
ce qui est un signe visible de la vérité des choses dont il est accusé. Il est vrai qu'il y a trois ou quatre femmelettes qui le suivent encore ; mais ce sont des femmes qui se laissent emporter à la passion, plutôt qu'à la conduite d'une droite raison.
Après tout, il faut que ce soit un étrange homme, puisqu'on lui préfère des voleurs et des homicides, et que ce sont gens craignant Dieu qui sollicitent contre lui : car ces gens s'exerçaient aux uvres de la Miséricorde, demandant la délivrance d'un prisonnier, et étaient si religieux, qu'ils ne voulaient pas transgresser la loi en entrant dans le prétoire, où ils eussent contracté une souillure légale.
On ajoutait de plus que Dieu, qui est protecteur des innocents, l'ayant lui-même abandonné, quoiqu'il l'appelât hautement, après tant de choses, il n'y avait plus à douter de ses prévarications ; enfin, qu'il était mort sur la croix, ce qui était une malédiction déclarée, non-seulement par l'opinion du vulgaire, mais par l'autorité des divines Écritures.
Voilà, ô prudence humaine, la conduite d'un Dieu-Homme ! Voilà, ô sages spirituels, comme un Dieu s'y est pris pour faire le plus grand bien qui ait jamais été fait.
Mais au moins, dira quelqu'un, il n'a pas voulu être accusé, et être suspect en matière de pureté. Il suffit que la Vierge des vierges, sa très pure Mère, ait été soupçonnée d'adultère, pour faire voir que l'on doit être prêt à souffrir à son honneur en toutes manières.
Aussi ce divin Maître, pour obvier à ces objections, après avoir dit à ses disciples : Vous serez bienheureux lorsqu'on parlera mal de vous, ajouta, et non pas sans dessein, lors même qu'on en dira toute sorte de mal (Matth. V, 11) Voyez-vous comme il n'excepte rien ? Combien de ses saints ont été noircis au sujet de la pureté !
Est-il possible, s'écriait sainte Thérèse, que je désire, ô mon Dieu ! que l'on ait quelque bonne opinion de moi, après que l'on a dit tant de mal de vous ?
Cest pour cela que l'Apôtre proteste que le monde lui est crucifié, et quil est crucifié au monde, c'est-à-dire que le monde et son honneur lui étaient en la même horreur qu'est aux yeux d'un passant la rencontre d'un homme attaché au plus infâme gibet, et qu'il était réciproquement en horreur au monde, voyant qu'il chérissait ce qu'il abhorrait, les mépris et les infamies ;
et c'est pour cela que cet homme apostolique assure qu'il était regardé comme un insensé. Oh ! que saint Ignace, le fondateur de la compagnie de Jésus, avait bien raison de dire aux siens, qui sont destinés pour faire de très grands biens par leurs emplois, que tout état dans lequel on est moqué et méprisé des hommes, et même tenu pour méchant et insensé, est un état précieux dans la vie spirituelle !
Je voudrais, dit la sainte que nous venons de citer, que l'étude de la pénitence fût dans l'amour des mépris et calomnies : en cela il n'est pas besoin de forces corporelles.
Source : livres-mystiques.com
Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
ami de la Miséricorde