L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L

Postez ici vos intentions de prière.
amidelamisericorde
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CINQUIÈME PARTIE
CHAPITRE II - QUELLE EST LA NATURE DE L'ÉTERNELLE BÉATITUDE ?

LA LUMIÈRE DE GLOIRE PRINCIPE DE LA VISION BÉATIFIQUE


Cette vision intuitive et immédiate atteint ainsi l'objet même de la vision incréée que Dieu a de lui-même ; elle l'atteint moins parfaitement que Lui, mais elle l'atteint.

Comment cela est-il possible ? Ce serait absolument impossible pour toute intelligence créée et créable laissée à ses seules forces naturelles, car ces forces sont proportionnées à leur objet naturel, lequel est infiniment inférieur à l'objet propre de l'intelligence divine.

L'intelligence créée, si haute soit-elle, a donc besoin d'une lumière surnaturelle qui l'élève, qui la fortifie, pour qu'elle devienne capable de voir Dieu tel qu'il est en soi ; autrement elle serait devant lui, comme l'oiseau de nuit devant le soleil, elle ne pourrait le voir ( Cf. SAINT THOMAS, Ia, q. 12, a. 4 et 5.). Cette lumière, reçue d'une façon permanente dans l'intelligence des bienheureux, est appelée lumière de gloire, et elle est en eux plus ou moins intense, selon le degré de leurs mérites et de leur charité. Le Concile de Vienne (Denz. 475) a condamné ceux qui prétendaient que «l'âme humaine n'a pas besoin d'être élevée par la lumière de gloire pour voir Dieu et jouir saintement de Lui ».

La vision béatifique procède ainsi de la faculté intellectuelle des bienheureux comme de son principe radical, et elle procède de la lumière de gloire comme de son principe prochain, qui surélève jusqu'à la vitalité de notre intelligence pour lui donner une vie nouvelle. Ainsi la vertu infuse de charité surélève la vitalité de notre volonté.

La lumière de gloire et la charité infuse, reçues dans nos deux facultés supérieures, dérivent de la grâce sanctifiante consommée, reçue comme une greffe divine en l'essence même de l'âme. On voit dès lors de mieux en mieux que la grâce sanctifiante mérite d'être appelée participation de la nature divine, car elle est un principe radical d'opérations, qui, lorsqu'il est pleinement développé, nous rend capables de voir Dieu immédiatement comme il se voit.

En Dieu, la nature divine est le principe des opérations strictement divines, comme la vision incréée de lui-même ; dans l'âme juste au ciel, la grâce sanctifiante est principe radical de la vision intuitive de la divine essence, vision qui a le même objet que la connaissance incréée, sans pourtant le pénétrer aussi profondément.

L'OBJET DE LA VISION BÉATIFIQUE

L'objet premier et essentiel est Dieu même ; l'objet secondaire, ce sont les créatures connues en Dieu. Les bienheureux voient clairement et intuitivement Dieu même tel qu'il est, c'est-à-dire : son essence, ses attributs et les trois personnes divines. Le Concile de Florence (Denz. 693) dit : « intuentur clare ipsum Deum trinum et unam sicuti est ». Par là la vision béatifique dépasse immensément non seulement la plus sublime philosophie, mais la connaissance naturelle des anges les plus élevés et de tout ange créable.

Les bienheureux voient toutes les perfections divines concentrées et harmonisées dans leur source commune, dans l'Essence divine qui les contient éminemment et formellement, plus et mieux que la lumière blanche ne contient les sept couleurs de l'arc-en-ciel. Ils voient aussi comment la Miséricorde la plus tendre et la justice la plus inflexible procèdent d'un seul et même Amour, infiniment généreux et infiniment saint ; comment la même qualité éminente d'amour identifie en soi des attributs en apparence si opposés.

Les bienheureux voient comment la Miséricorde et la justice s'unissent de façons variées en toutes les oeuvres de Dieu. Ils voient comment l'Amour incréé, même en son bon plaisir le plus libre, s'identifie avec la pure Sagesse, comment rien n'est en lui qui ne soit sage, et comment rien n'est dans la divine Sagesse qui ne se convertisse en amour. Ils voient comment cet Amour s'identifie avec le Souverain Bien toujours aimé de toute éternité, comment la divine Sagesse s'identifie avec la Vérité première toujours connue, comment toutes ces perfections ne font qu'un dans l'essence même de Celui qui est.

Source : Livres-mystiques.com

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CINQUIÈME PARTIE

CHAPITRE II - QUELLE EST LA NATURE DE L'ÉTERNELLE BÉATITUDE ?

L'OBJET DE LA VISION BÉATIFIQUE


Ils contemplent cette éminente simplicité de Dieu, cette pureté et cette sainteté absolue, condensation de toutes les perfections sans trace d'aucune imperfection.

Du même et unique regard intellectuel, jamais interrompu, ils voient aussi l'infinie fécondité de la nature divine s'épanouissant en trois Personnes, l'éternelle génération du Verbe, « splendeur du Père et figure de sa substance, » l'ineffable spiration du Saint Esprit, terme de l'amour mutuel du Père et du Fils, qui éternellement les unit dans la plus intime diffusion d'eux-mêmes.

Tel est l'objet premier de la vision béatifique.

Ici-bas nous ne pouvons qu'énumérer les perfections divines, les unes après les autres, et nous ne voyons pas de quelle manière intime elles se concilient ; comment l'infinie bonté s'unit à la permission du mal et parfois d'une malice effroyable ; nous disons justement que Dieu ne permet le mal que pour un plus grand bien, mais ce plus grand bien nous ne le voyons pas encore à découvert.

Alors au contraire, au ciel, tout s'éclairera. Nous verrons tout le prix des épreuves subies, de même nous verrons comment se concilient intimement l'infinie justice si redoutable et la tendresse de l'infinie Miséricorde, comment elles se concilient dans l'amour incréé de la divine Bonté ; car celle-ci est essentiellement diffusive de soi, c'est le principe de la Miséricorde ; et d'autre part cette infinie Bonté a droit à être aimée par-dessus tout ; c'est le principe de la justice.

Nous sommes ici-bas comme un homme qui connaîtrait les sept couleurs de l'arc-en-ciel, mais qui n'aurait jamais vu la lumière blanche. Au ciel nous verrons la Lumière incréée et par là même comment les perfections divines les plus différentes se concilient en elle et ne font qu'un.

Mais les bienheureux voient aussi en Dieu, in Verbo, la sainte humanité que le Fils unique a assumée pour toujours pour notre salut.

Ils contemplent en elle la grâce d'union hypostatique, la plénitude de grâce, de gloire et de charité de la sainte âme de Jésus, la valeur infinie de ses actes théandriques, le prix sans mesure du mystère de la Rédemption, son rayonnement, la valeur infinie de chaque Messe, la vitalité surnaturelle de tout le corps mystique, de l'Église triomphante, souffrante et militante.

Ils voient avec admiration ce qui appartient au Christ comme Prêtre pour l'éternité, comme juge des vivants et des morts, comme Roi universel de toutes les créatures et comme Père des pauvres.

Par la même vision béatifique les saints contemplent en Dieu l'éminente dignité de la Mère de Dieu, sa plénitude de grâce, ses vertus, ses dons, sa médiation universelle de co-rédemptrice.

Et puisque la béatitude est un état parfait qui comporte la réunion de tous les biens légitimes, chaque saint au ciel connaît en Dieu les autres bienheureux, surtout ceux qu'il a connus précédemment et qu'il a surnaturellement aimés.

Source : Livres-mystiques.com

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CHAPITRE III - L'EXCELLENCE DE LA VISION BÉATIFIQUE

L'OBJET DE LA VISION BÉATIFIQUE


De même chaque saint voit, soit en Dieu, soit hors de Dieu par des idées créées, ceux qui sont encore sur la terre ou au purgatoire et qui ont un rapport spécial avec lui. ( Cf. SAINT THOMAS Ia, q. 12, a. 10. Ce que les bienheureux voient en Dieu, ils le voient non pas successivement, mais simultanément, car la vision béatifique, mesurée par l'éternité participée, ne comporte pas de succession.

Ce que les bienheureux apprennent successivement, ils le voient extra Verbum, par une connaissance inférieure à la vision béatifique et appelée pour cela la vision du soir, tandis que la première est comme un éternel matin. Cf. Dict. Théol. Cath., art. Intuitive (vision), c. 2387, ss. ). Par exemple un fondateur d'Ordre connaît tout ce qui concerne sa famille religieuse et les prières que ses fils lui adressent.

Un père et une mère de famille connaissent les besoins spirituels de leurs enfants qui sont encore ici-bas ; un ami arrivé au but de sa course connaît de même ce qui peut faciliter le voyage des amis qui s'adressent à lui.

Saint Cyprien (De immortalitate, c. 25) nous dit « Dans la patrie tous ceux des nôtres qui y sont arrivés nous attendent, désirent vivement que nous participions à la même béatitude et sont pleins de sollicitude à notre égard ».

La vision béatifique est donc un acte unique toujours identique, mesuré par l'unique instant de l'immobile éternité ; c'est donc un acte inamissible, source du bonheur des élus et, nous allons le voir, de leur impeccabilité absolue.

Dans cette connaissance surnaturelle parfaite tout s'harmonise, il n'y a plus danger de donner trop d'attention au secondaire, en perdant de vue le principal. On ne voit les choses corporelles que d'en haut par rapport aux choses spitiruelles. On ne voit celles du temps que par rapport à la plénitude de vie de l'éternité.

On ne voit plus les effets naturels ou surnaturels de Dieu que comme le rayonnement de son action ; ces effets dès lors ne peuvent plus nous arrêter à eux. On ne voit plus les moyens que par rapport à la fin ultime, à Dieu principe et fin de tout. Ce n'est plus la vue horizontale qui atteint tout sur la ligne du temps entre le passé et le futur, c'est la vue verticale qui juge de tout d'en haut par la Vérité suprême.

Aussi tout ce que fait connaître la vision béatifique porte les saints à aimer Dieu par-dessus tout d'un amour immuable, et à aimer ses créatures en Lui, dans la mesure où elles sont une manifestation de son infinie bonté.

CHAPITRE IV - L'AMOUR BÉATIFIQUE ET LA JOIE QUI EN RÉSULTE

Les saints au ciel ne peuvent voir Dieu face à face sans l'aimer par-dessus tout et plus qu'eux-mêmes, parce qu'ils voient avec la plus parfaite évidence que Dieu est infiniment meilleur que toutes les créatures réunies.

L'AMOUR SUPRÊME DE CHARITÉ

SAINT PAUL dit I. COR., XIII, 8 : « La charité ne passera jamais ». La foi cessera pour faire place à la vision, l'espérance aussi pour être remplacée par la possession, mais la charité durera éternellement dans les élus.

Source : Livres-mystiques.com

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CHAPITRE IV - L'AMOUR BÉATIFIQUE ET LA JOIE QUI EN RÉSULTE

L'AMOUR SUPRÊME DE CHARITÉ


Par elle, déjà ici-bas, nous aimons Dieu non seulement comme le bien souverainement désirable, objet de l'espérance, mais nous l'aimons pour lui-même et plus que nous, à cause de son infinie bonté, très supérieure à ses dons, et nous voulons qu'il soit connu et aimé, qu'il soit glorifié, que ses droits imprescriptibles soient reconnus, que « son nom soit sanctifié, une sa volonté soit faite », nous le voulons par amour pour Lui. C'est là un amour d'amitié par lequel nous voulons à Dieu le bien qui lui convient, comme lui-même veut le nôtre ; dès ici-bas nous participons à sa vie intime par une vie commune surnaturelle (convictus, convivere), par une communion spirituelle entre Lui et nous ( Cf. SAINT THOMAS, IIa IIae, q.23 a. 1 : Utrum caritas sit amicitia.).

Cette charité doit durer éternellement. Ce serait une erreur et même une hérésie de penser que l'amour de Dieu au ciel n'est que la consommation de l'espérance, qui nous fait désirer Dieu comme notre bien suprême. Déjà sur terre l'acte d'espérance qui peut exister dans une âme en état de péché mortel, est notablement inférieur à l'acte de charité, et l'amour de Dieu au ciel sera l'acte parfait de charité. Aussi ce sera un amour par lequel l'âme se dépassera elle-même, elle aimera sans cesse Dieu pour Lui, elle sortira d'elle-même pour ainsi dire ; ce sera l'extase ininterrompue de l'amour. ( Ia, IIae, q. 28, a. 3, Utrum extasis sit effectus amoris : « In amore amicitiae affectus alicujus simpliciter exit extra se, quia vult amico bonum et operatur bonum ».).

Cet amour sera fait d'admiration, de respect, de reconnaissance, surtout d'amitié avec la simplicité et toute l'intimité qu'elle comporte ; ce sera l'amour avec toute sa tendresse et toute sa force, l'amour de l'enfant qui se plonge en quelque sorte dans le regard aimant et la tendresse de son Père, et qui veut à son Père tout ce qui lui convient, comme le Père le fait participer à sa propre béatitude. Dieu nous dira : « Entre dans ma béatitude infinie : intra in gaudium Domini tui », MATTH., XXV, 21. « Venez les bénis de mon Père », MATTH., XXV, 34. Nous n'aimerons jamais Dieu autant qu'il nous aime, mais le Saint Esprit nous inspirera pourtant un amour digne de lui.

Ce sera l'union transformante consommée, comme la fusion de notre vie et de la vie intime du Très-Haut qui s'inclinera vers nous pour nous attirer définitivement à lui. Par cet amour nous nous réjouirons surtout que Dieu soit Dieu, infiniment saint, juste et miséricordieux, par cet amour nous adorerons tous les décrets de sa Providence en vue de sa gloire, de la manifestation de sa bonté et nous nous subordonnerons pleinement à Lui, en lui disant « Non nobis, Domine, non nobis, sed nomini tuo da gloriam ». « Non pas à nous, Seigneur, non pas à nous, mais à ton nom donne la gloire ». Ps. CXIII, 1.

Ce sera l'acte suprême de la plus haute des trois vertus théologales, la seule qui doit durer éternellement. Dieu seul peut s'aimer infiniment, autant qu'il est aimable, mais chaque bienheureux l'aimera continuellement de tout son pouvoir, et il n'y aura plus d'obstacle à cet amour (cf. IIa, IIae q. 184, a 2).

LES BIENHEUREUX INSATIABLEMENT RASSASIÉS DE LA VÉRITÉ
FRAICHEUR TOUJOURS NOUVELLE D'UN ÉTERNEL PRINTEMPS


Ce rassasiement est toujours nouveau, sa nouveauté ne passe pas. Saint Augustin dans le Sermon 362, n. 29 parle admirablement de ce sujet. Ce passage est cité par Bossuet, IVe Sermon pour la fête de tous les Saints.

Source : Livres-mystiques.com

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CHAPITRE IV - L'AMOUR BÉATIFIQUE ET LA JOIE QUI EN RÉSULTE

LES BIENHEUREUX INSATIABLEMENT RASSASIÉS DE LA VÉRITÉ
FRAICHEUR TOUJOURS NOUVELLE D'UN ÉTERNEL PRINTEMPS


En cet endroit saint Augustin a écrit : « Toute notre action sera un Amen, un Alleluia. (Amen veut dire cela est vrai, et Alleluia est l'expression de la louange dans l'adoration et l'action de grâces). Mais n'allez pas vous attrister en considérant cette chose d'une manière toute chamelle et ne dites pas ici que si quelqu'un entreprenait, étant debout, de dire toujours Amen, Alleluia, il serait bientôt consumé d'ennui, et s'endormirait enfin tout en répétant ces paroles.

Cet Amen, cet Alleluia, ne seront point exprimés par des sons qui passent, mais par les sentiments de l'âme embrasée d'amour. Car que signifie cet Amen ? que veut dire cet Alleluia ?

Amen, il est vrai ; Alleluia, louez Dieu. Dieu est la vérité immuable, qui ne connaît ni défaut, ni progrès, ni déchet, ni accroissement, ni le moindre attrait pour la fausseté : vérité éternelle et stable, elle demeure toujours incorruptible.

« Ainsi nous dirons effectivement Amen, mais avec une satiété insatiable : avec satiété, parce que nous serons dans une parfaite abondance ; mais avec une satiété toujours insatiable, si l'on peut parler ainsi, parce que ce bien, toujours satisfaisant, produira en nous un plaisir toujours nouveau.

Autant donc que vous serez insatiablement rassasié de la vérité, autant direz-vous par cette insatiable vérité Amen, il est vrai. Ouam ergo insatiabiliter satiaberis veritate, tam insatiabili veritate dices : Amen. Reposez-vous et voyez ; ce sera un sabbat continuel ».

Ce sera un éternel repos dans une action souveraine qui ne cessera pas, et qui sera en quelque sorte toujours nouvelle ; le repos en Dieu éternellement possédé et aimé par-dessus tout et plus que nous.

Les philosophes grecs ont discuté pour savoir si la béatitude se trouve dans le plaisir en mouvement ou dans le plaisir en repos. Aristote montre bien que la joie la plus haute est celle qui est le complément, l'achèvement de l'activité normale parfaite, qui ne tend plus vers sa fin, mais la possède et se repose en elle ( Ethique à Nicomaque, l. X, c. 4, 5, 8 . « Le plaisir s'ajoute à l'acte comme à la jeunesse sa fleur ». Et la plus haute joie est celle qui résulte de l'acte le plus élevé de la plus haute faculté, c'est-à-dire de la connaissance intellectuelle de Dieu, unie à l'amour du Souverain Bien.). C'est ce qui se réalise éminemment dans la béatitude du ciel.

La joie qui s'y trouve est un rassasiement toujours nouveau, parce que sa nouveauté ne passe pas. Le premier instant de la vision béatifique dure toujours, comme un éternel matin, un éternel printemps, une éternelle jeunesse. Cela s'explique si l'on considère la béatitude même de Dieu.

Il possède sa vie tout à la fois dans l'unique instant de l'immobile éternité ; il ne saurait vieillir ; pour Lui il n'y a pas de passé, ni de futur, mais un éternel présent, qui contient éminemment toute la suite des temps comme le sommet d'une pyramide ou d'un cône contient éminemment tous les points de la base de cette figure géométrique, comme le regard d'un homme placé sur une montagne embrasse toute la vallée. Dieu possède ainsi « toute à la fois » « tota simul » sa vie sans commencement ni fin ; c'est la définition de l'éternité.

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CHAPITRE IV - L'AMOUR BÉATIFIQUE ET LA JOIE QUI EN RÉSULTE

LES BIENHEUREUX INSATIABLEMENT RASSASIÉS DE LA VÉRITÉ FRAICHEUR TOUJOURS NOUVELLE D'UN ÉTERNEL PRINTEMPS


Nous pouvons soupçonner cette richesse quand on nous dit que Mozart, en composant une mélodie, l'entendait « toute à la fois », dans la loi musicale qui l'engendrait ; il entendait déjà la fin en composant le début. Ainsi les grands savants embrassent toute leur science d'un seul regard.

Or la vision béatifique des saints est mesurée elle aussi par l'unique instant de l'immobile éternité. De la sorte l'immense joie de l'instant de leur entrée au ciel ne passera pas ; sa nouveauté, sa fraîcheur sera éternellement présente. Et donc, en ce sens, cette vision sera toujours nouvelle et de même la joie qui résultera d'elle.

Nous le pressentons par la joie très pure que nous éprouvons en goûtant la parole de Dieu. Si nous sommes bien disposés, c'est une joie qui ne passe pas, mais qui augmente, parce que nous voyons toujours de mieux en mieux le prix de la parole divine ; plus nous la recevons, plus nous sommes avides de la recevoir, tandis que plus nous possédons les biens sensibles d'abord vivement désirés, plus nous voyons leur limite, et plus la joie qu'ils nous donnent diminue.

Si une amitié spirituelle dure dix ans, vingt ans et plus et reste toujours nouvelle, c'est un signe qu'elle est d'origine divine. De même la parole de Dieu donne une sainte joie, qui fait oublier pour un temps les embarras des affaires, les soins empressés d'une maison, la recherche trop ardente des vains divertissements.

Ce qui nourrit l'âme, c'est la vérité divine et la bonté suprême entrevues. Comme le dit Bossuet, loc. cit., « si cette vérité divine nous délecte quand elle nous est exprimée par des sons qui passent, combien nous ravira-t-elle quand elle nous parlera de sa propre voix éternellement permanente !... Dieu au ciel, ne dit pas beaucoup de paroles, il en dit une seule, la même de toute éternité, son Verbe, et il a tout dit.

C'est en ce Verbe que nous verrons tout » - « Goûtez et voyez combien le Seigneur est doux » dit le Psalmiste et vous aurez comme le prélude de la joie du ciel. Ce sera le repos dans une action incessante, dans une vision immédiate de Dieu, qui remplira l'âme d'amour et d'une joie toujours nouvelle. Gaudium de veritate et de bonitate divina.

Saint Thomas ( Ia, IIae, q. 2, a. 1, a. 3m ; IIa, IIae q. 20, a. 4.) dit, avec saint Augustin : tandis qu'on se fatigue des biens sensibles quand on les possède, au contraire plus on possède les biens spirituels plus on les aime ; car ils ne se consument pas, ne s'épuisent pas et sont de nature à produire en nous une joie toujours nouvelle.

On l'expérimente quelquefois dans l'oraison, c'est comme la réalisation de l'admirable prière de Saint Nicolas de Flue : « Mon Seigneur et mon Dieu, enlève-moi tout ce qui m'empêche d'aller à Toi ; donne-moi tout ce qui me conduira jusqu'à Toi ; prends-moi à moi et donne-moi tout à Toi pour que je t'appartienne totalement ».

C'est comme si Dieu pénétrait de plus en plus dans les profondeurs de notre volonté spirituelle, qui désire de plus en plus être prise et comme blessée par lui, pour qu'il la possède pleinement.

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LES BIENHEUREUX INSATIABLEMENT RASSASIÉS DE LA VÉRITÉ FRAICHEUR TOUJOURS NOUVELLE D'UN ÉTERNEL PRINTEMPS


Nous pouvons soupçonner cette richesse quand on nous dit que Mozart, en composant une mélodie, l'entendait « toute à la fois », dans la loi musicale qui l'engendrait ; il entendait déjà la fin en composant le début. Ainsi les grands savants embrassent toute leur science d'un seul regard.

Or la vision béatifique des saints est mesurée elle aussi par l'unique instant de l'immobile éternité. De la sorte l'immense joie de l'instant de leur entrée au ciel ne passera pas ; sa nouveauté, sa fraîcheur sera éternellement présente. Et donc, en ce sens, cette vision sera toujours nouvelle et de même la joie qui résultera d'elle.

Nous le pressentons par la joie très pure que nous éprouvons en goûtant la parole de Dieu. Si nous sommes bien disposés, c'est une joie qui ne passe pas, mais qui augmente, parce que nous voyons toujours de mieux en mieux le prix de la parole divine ; plus nous la recevons, plus nous sommes avides de la recevoir, tandis que plus nous possédons les biens sensibles d'abord vivement désirés, plus nous voyons leur limite, et plus la joie qu'ils nous donnent diminue.

Si une amitié spirituelle dure dix ans, vingt ans et plus et reste toujours nouvelle, c'est un signe qu'elle est d'origine divine. De même la parole de Dieu donne une sainte joie, qui fait oublier pour un temps les embarras des affaires, les soins empressés d'une maison, la recherche trop ardente des vains divertissements.

Ce qui nourrit l'âme, c'est la vérité divine et la bonté suprême entrevues. Comme le dit Bossuet, loc. cit., « si cette vérité divine nous délecte quand elle nous est exprimée par des sons qui passent, combien nous ravira-t-elle quand elle nous parlera de sa propre voix éternellement permanente !... Dieu au ciel, ne dit pas beaucoup de paroles, il en dit une seule, la même de toute éternité, son Verbe, et il a tout dit.

C'est en ce Verbe que nous verrons tout » - « Goûtez et voyez combien le Seigneur est doux » dit le Psalmiste et vous aurez comme le prélude de la joie du ciel. Ce sera le repos dans une action incessante, dans une vision immédiate de Dieu, qui remplira l'âme d'amour et d'une joie toujours nouvelle. Gaudium de veritate et de bonitate divina.

Saint Thomas ( Ia, IIae, q. 2, a. 1, a. 3m ; IIa, IIae q. 20, a. 4.) dit, avec saint Augustin : tandis qu'on se fatigue des biens sensibles quand on les possède, au contraire plus on possède les biens spirituels plus on les aime ; car ils ne se consument pas, ne s'épuisent pas et sont de nature à produire en nous une joie toujours nouvelle.

On l'expérimente quelquefois dans l'oraison, c'est comme la réalisation de l'admirable prière de Saint Nicolas de Flue : « Mon Seigneur et mon Dieu, enlève-moi tout ce qui m'empêche d'aller à Toi ; donne-moi tout ce qui me conduira jusqu'à Toi ; prends-moi à moi et donne-moi tout à Toi pour que je t'appartienne totalement ».

C'est comme si Dieu pénétrait de plus en plus dans les profondeurs de notre volonté spirituelle, qui désire de plus en plus être prise et comme blessée par lui, pour qu'il la possède pleinement.

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CHAPITRE IV - L'AMOUR BÉATIFIQUE ET LA JOIE QUI EN RÉSULTE

AMOUR SOUVERAINEMENT SPONTANÉ MAIS AU-DESSUS DE LA LIBERTÉ


Les thomistes enseignent communément in Iam, IIae, e. 4, a. 4 : « Visionem beatificam sequitur felix amandi necessitas etiam quoad exercitium. Voluntas beatorum totaliter impletur, adaequatur, imo inundatur et vincitur a Summo bono clare viso. ».

Notre amour de Dieu, au ciel, sera donc souverainement spontané, nullement forcé, mais il ne sera plus libre, nous ne pourrons pas ne pas aimer Dieu vu face à face.

Certes cet amour ne sera pas au-dessous de la liberté et du mérite comme un acte irréfléchi et involontaire de sensibilité ; mais il sera au-dessus de la liberté et du mérite, comme l'amour très spontané que Dieu se porte à lui-même de toute éternité, et qui est commun aux trois Personnes divines.

Dieu aime nécessairement sa bonté infinie. Pour la même raison, connue la vision béatifique dont il sera la conséquence nécessaire, notre acte d'amour de Dieu ne sera jamais interrompu et ne pourra plus rien perdre de sa ferveur.

Je lisais récemment l'expression de cette haute vérité dans les manuscrits d'une personne qui n'a aucune culture humaine, mais qui parait avancée dans les voies de l'oraison : « Au ciel, dit-elle, l'âme accueille Dieu en elle, et étant accueillie par Lui et en Lui, elle perd en Lui sa liberté, en tant qu'elle est entièrement attirée par Dieu, et qu'elle s'adonne à la jouissance de Dieu avec toute sa force et avec tout l'élan possible.

Elle possède Dieu et elle est possédée par Lui, et elle expérimente cette jouissance comme son état éternel ». État toujours nouveau en ce sens que sa nouveauté ne passe pas, comme le serait un éternel matin.

L'IMPECCABILITÉ DES BIENHEUREUX

Il suit de là aussi que les bienheureux au ciel sont impeccables, et ils le sont, non pas seulement parce que Dieu les préserve du péché, comme il préserve ici-bas des saints confirmés en grâce, mais parce que celui qui a la vision béatifique de l'infinie Bonté, ne peut se détourner d'elle par le péché mortel, ni trouver le moindre prétexte de moins l'aimer un seul moment ( Cf. SAINT-THOMAS, Ia, IIae, q. 4, a. 4. et Commentaires de CAJETAN, JEAN DE SAINT THOMAS, GONET, BILLUART.).

De même qu'ici-bas l'homme ne peut cesser de vouloir être heureux (quoiqu'il cherche souvent le bonheur là où il n'est pas, même parfois dans le suicide), ainsi au Ciel les saints ne peuvent cesser de vouloir aimer Dieu vu face à face, ni cesser de vouloir le contempler.

Ils restent pourtant libres d'aimer tel ou tel bien fini, telle ou telle âme, de préférence à une autre, de prier pour elle, et c'est librement qu'ils exécutent les ordres de Dieu pour nous assister. Mais cette liberté ne dévie jamais du côté du mal ; elle ressemble ainsi de loin à la liberté divine, qui est à la fois souveraine et impeccable.

Il en était ainsi dès ici-bas de la liberté humaine du Christ, qui jouissait de la vision béatifique dès le premier instant de sa conception. Mais en Jésus ces actes libres sur terre étaient encore méritoires, car il était encore voyageur « viator et comprehensor », tandis que les actes libres des bienheureux ne sont plus méritoires puisqu'il sont arrivés au terme de leur voyage et du mérite. Ce sont les actes libres d'âme confirmée en grâce, et qui n'a plus rien à mériter.

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CHAPITRE IV - L'AMOUR BÉATIFIQUE ET LA JOIE QUI EN RÉSULTE

L'INAMISSIBILITÉ DE LA BÉATITUDE


Enfin il suit de tout ce que nous venons de dire que la béatitude céleste est inamissible, et elle l'est par sa nature même ou intrinsèquement. L'Écriture l'appelle « la vie éternelle ». Jésus dit : « Ceux-ci (les méchants) s'en iront à l'éternel supplice, et les justes à la vie éternelle » ( MATTH., XXV, 46.). Saint Pierre parle « de la couronne de gloire, qui ne se flétrit jamais » ( I. PETR., V, 4. ).

Saint Paul dit que « cette couronne est impérissable » ( I COR., IX, 25 ) et il ajoute : « notre légère affliction du moment présent produit pour nous, au delà de toute mesure, un poids éternel de gloire » ( II. COR., IV, 17.). Le Credo s'achève par ces mots « Credo... in vitam aeternam » ( Cf. Conc. Lateran., IV, Denz. 430 ).

L'expression « vie éternelle » dit beaucoup plus que « vie future ». Le futur n'est qu'une partie du temps qui s'écoule, il comporte lui-même une succession de moments divers. Au contraire « la vie éternelle » n'est pas mesurée par le temps, ni par le temps continu (comme notre temps solaire), ni par le temps discret ou discontinu ou spirituel de la succession des pensées et des sentiments dans l'âme séparée non encore béatifiée ; la vie éternelle est mesurée par l'unique instant de l'immobile éternité, un instant qui ne passe pas, comme une éternelle aurore, ou un lever de soleil qui ne passerait pas.

Les théologiens disent que la vie éternelle des bienheureux est mesurée par l'éternité participée. Celle-ci diffère sans doute de l'Éternité par essence qui est propre à Dieu ; elle en diffère parce qu'elle a commencé au moment de l'entrée au ciel, mais ensuite elle ne finira pas, et de plus elle ne comportera en elle-même aucune succession ; ce sera vraiment l'instant unique de l'éternité immobile, mais souverainement vivante, puisque ce sera la condensation de toute la vie de l'intelligence et de la volonté dans la vision et l'amour, avec toute la tendresse et la force de celui-ci.

Cependant au-dessous de cette vision, et de cet amour qui ne seront jamais interrompus à la cime de l'âme béatifiée, il y aura dans une région moins haute de l'intelligence et de la volonté, une succession de pensées (de connaissances particulières, extra Verbum, par des idées créées) et une succession de sentiments, de vouloirs subordonnés, comme par exemple les prières adressées à Dieu à la demande de telle ou telle âme de la terre.

Cette inamissibilité de la béatitude dérive de l'essence de celle-ci. La béatitude céleste doit en effet par sa nature combler les aspirations de l'âme juste, ce qui n'existerait pas si les bienheureux pouvaient se dire : il arrivera peut-être une heure où je cesserai de voir Dieu.

La cessation de la béatitude serait du reste, surtout après l'avoir possédée, la souveraine douleur et une peine qui serait infligée sans aucune faute. Si nous tenons tant à la vie présente malgré ses tristesses, combien plus tiendrons-nous à la vie du ciel !

Enfin rien ne peut faire cesser la vision béatifique, ni Dieu qui l'a promise comme récompense, ni l'âme qui trouve par elle le Souverain bien (Ia, IIae, q. 5, a. 4).

Le Catéchisme du Concile de Trente ( Ia, P., c. 13, n. 3.), dit : « Celui qui est heureux peut-il ne pas désirer ardemment de jouir sans fin de ce qui fait son bonheur ? Et sans l'assurance d'une félicité stable et certaine, ne serait-il pas malgré lui en proie à tous les tourments de la crainte ? »

Source : Livres-mystiques.com

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CINQUIÈME PARTIE
CHAPITRE IV - L'AMOUR BÉATIFIQUE ET LA JOIE QUI EN RÉSULTE

L'INAMISSIBILITÉ DE LA BÉATITUDE


Les âmes bienheureuses sont au-dessus des heures, des jours, des années, elles sont dans l'unique instant qui ne passe pas. Nous ne pensons certainement pas assez à l'instant de l'entrée an ciel, à l'instant où nous recevrons la lumière de gloire et où nous verrons Dieu pour toujours.

Or cet instant doit être préparé;, par rapport à lui trois autres ont une importance capitale : celui de la justification par le baptême, celui de la réconciliation avec Dieu si nous l'avons gravement offensé, et celui de la bonne mort ou de la persévérance finale. C'est là ce qui compte le plus pour nous préparer à la vie éternelle.

Nous ne pouvons nous faire une idée de la grandeur de l'amour béatifique, mais cependant il correspondra comme degré d'intensité à nos mérites, et donc ce n'est pas au ciel que nous apprendrons à aimer Dieu, c'est ici-bas que nous devons l'apprendre; le degré de notre vie de l'éternité dépendra du degré de nos mérites au moment de la mort.

Jésus a dit : « Il y a plusieurs demeures dans la maison de mon Père » ( JOAN., XIV, I.) et chacun selon ses mérites et la sincérité de son désir, y recevra une récompense plus ou moins grande. « Celui qui sème peu, recueillera peu ; celui qui sème beaucoup, moissonnera beaucoup » ( II COR., IX, 6. cf. SAINT THOMAS, Suppl., q. 93, a. 3.).

La vie chrétienne, par la charité qui l'anime, doit être en ce sens la vie éternelle commencée. La grâce sanctifiante et la charité, qui dès maintenant sont en nous, doivent durer éternellement. Comme le dit saint Jean de la Croix, « au soir de notre vie nous serons jugés sur l'amour », sur la sincérité, la générosité et le degré de notre amour de Dieu et du prochain.

La joie éternelle qui résultera de la vision immédiate de l'essence divine et de l'amour béatifique est inexprimable. Si déjà nous sommes enchantés par le reflet des perfections divines dans les créatures, par les fééries du monde sensible, par les harmonies des couleurs et des sons, par l'immensité de l'océan, par les splendeurs du ciel étoilé, et plus encore par les splendeurs spirituelles que révèle la vie des saints, que sera-ce lorsque nous verrons Dieu, ce foyer spirituel de lumière et d'amour, cette plénitude infinie éternellement subsistante, d'où procède la vie de la création !

Chacun se réjouira. non seulement de la récompense reçue, mais aussi de celle des autres élus et plus encore de la gloire de Dieu, de la manifestation de l'infinie Bonté. Cette joie sera donc un acte de la vertu de charité, la suite normale de l'amour de Dieu et des créatures pour Dieu. Telle est la gloire essentielle que Dieu réserve à ceux qui l'aiment : « L'oeil de l'homme, dit saint Paul, n'a pas vu, l'oreille n'a pas entendu, le coeur de l'homme n'a pas désiré les choses que Dieu a préparées pour ceux qui l'aiment » I. COR., II, 9.

Alors nous verrons l'immense opposition des biens matériels et des biens spirituels. Les mêmes biens matériels, la même maison, le même champ, le même territoire ne peuvent appartenir simultanément et intégralement à plusieurs, la possession de celui-ci empêche l'autre de posséder comme il le désire, car ces biens matériels sont trop pauvres pour répondre aux désirs de tous. Au contraire, les mêmes biens spirituels, la même vérité, la même vertu, le même Dieu vu face à face, peuvent appartenir simultanément à tous, sans que la possession de l'un gêne celle de l'autre. Bien plus, nous possédons ces biens spirituels d'autant mieux que nous les possédons avec les autres et que nous nous réjouissons de leur joie.

Source : Livres-mystiques.com

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CHAPITRE IV - L'AMOUR BÉATIFIQUE ET LA JOIE QUI EN RÉSULTE

L'INAMISSIBILITÉ DE LA BÉATITUDE


De même au ciel nous verrons clairement que la bonté est essentiellement communicative, et qu'elle se donne d'autant plus intimement et abondamment qu'elle est d'un ordre spirituel plus élevé. Dieu le Père de toute éternité communique toute sa nature à son Fils et par lui au Saint-Esprit ; la personne du Verbe s'est communiquée à l'humanité de Jésus et par elle, dans la communion, nous communique une participation toujours plus élevée de la vie divine.

Les élus au ciel sont de la famille de Dieu. La Sainte Trinité vue à découvert et aimée par-dessus tout habite en eux comme dans un tabernacle vivant, comme dans un temple de gloire doué de connaissance et d'amour. Dès lors le Père en eux engendre le Verbe dans l'unique instant de l'éternité ; le Père et le Fils en eux spirent l'Amour personnel.

La charité les rend dans une mesure semblables au Saint-Esprit, la vision les assimile au Verbe, qui les assimile lui-même au Père dont il est l'image. Ils entrent ainsi en un sens dans le cycle de la Trinité sainte, qui est en eux, et plus encore ils sont en elle, au sommet de l'Être, de la Pensée et de l'Amour ( Cf. BOSSUET, Méditations sur l'Evangile, 2e partie, 75e-76e jours: les élus aimés de Dieu en Jésus. - Père saint. ).

L'AMOUR DES SAINTS POUR NOTRE SEIGNEUR ET SA SAINTE MÈRE

Les Bienheureux, voyant à découvert les trois Personnes divines, voient de même en Dieu l'union personnelle du Verbe et de l'humanité de jésus, la plénitude de grâce, de gloire, de charité de sa sainte âme, les trésors de son Coeur, la valeur infinie de ses actes théandriques, de ses mérites passés, le prix de sa Passion, de la moindre goutte de son sang, la valeur sans mesure de chaque messe, le fruit des absolutions ; ils voient de même la gloire qui rejaillit de l'âme du Sauveur sur son corps depuis sa résurrection, et, comment depuis l'Ascension, il est au sommet de toute la création matérielle et spirituelle.

Ils voient de même in Verbo Marie corédemptrice, l'éminente dignité de sa Maternité divine, qui, par son terme est de l'ordre hypostatique, supérieur à ceux de la nature et de la grâce. Ils contemplent aussi la grandeur de son amour au pied de la croix, son élévation au-dessus des hiérarchies angéliques, le rayonnement de sa médiation universelle. Cette vision in Verbo de Jésus et de Marie se rattache à la béatitude essentielle, comme l'objet secondaire le plus élevé se rattache dans la vision béatifique à l'objet premier.

Au contraire la vision extra Verbum et à plus forte raison la vision sensible du Christ et du corps glorieux de Marie appartiennent à la béatitude accidentelle. Il y a une grande différence entre ces deux connaissances, la plus haute est appelée par saint Augustin la vision du matin, l'autre la vision du soir, car elle atteint les créatures, non pas dans la lumière divine, mais dans leur lumière créée qui est comme celle du crépuscule.

On voit mieux cette différence si l'on pense: deux connaissances qu'on peut avoir des lunes sur la terre : on peut les considérer en elles-mêmes par ce qu'elles disent ou écrivent, comme le fait un psychologue, ou on peut les considérer en Dieu comme le faisait par exemple le Saint Curé d'Ars lorsqu'il écoutait en confession ceux qui s'adressaient à lui ; il fut le génie surnaturel du confessionnal parce qu'il écoutait les âmes en Dieu, en restant en oraison, et c'est pourquoi sous l'inspiration divine, il leur donnait une réponse surnaturelle non seulement vraie mais immédiatement applicable et l'on allait à lui parce qu'il avait l'âme pleine de Dieu.

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CHAPITRE IV - L'AMOUR BÉATIFIQUE ET LA JOIE QUI EN RÉSULTE

L'AMOUR DES SAINTS POUR NOTRE SEIGNEUR ET SA SAINTE MÈRE


Les Saints par suite aiment ardemment Notre Seigneur, comme leur Sauveur, auquel ils doivent tout. Ils voient que sans lui, ils n'auraient rien pu faire dans l'ordre du salut ; ils voient jusqu'au moindre détail, toutes les grâces qu'ils ont reçues de lui, qu'ils lui doivent tous les effets de leur prédestination : la vocation, la justification conservée, la glorification ; ils ne cessent de l'en remercier. Ils sont toujours vivifiés par Lui. Chacun voit en Lui l'Époux des âmes et aussi l'Époux de l'Église militante, souffrante et triomphante. Quelle vue et quel amour n'ont-ils pas du Corps mystique dont Jésus est la tête ! Ils se sentent aimés de Dieu en Jésus-Christ comme ses membres.

Alors se réalise ce qui est dit dans l'APOCALYPSE V, 12 : « Des milliers d'anges disent d'une voix forte « L'Agneau qui a été immolé est digne de recevoir la puissance, la richesse, la sagesse, la force, l'honneur, la gloire et la bénédiction ». C'est « l'Agneau immolé qui a racheté par son sang les hommes de toute tribu, de toute langue, de tout peuple, de toute nation ». (APOC., V, 9) « La Jérusalem céleste n'a besoin ni du soleil, ni de la lune pour l'éclairer, car la gloire de Dieu l'illumine et l'Agneau est son flambeau. Les nations marcheront à sa lumière et les rois de la terre y apporteront leur magnificence... Il n'y entrera rien de souillé, mais ceux-là seuls qui sont inscrits dans le livre de vie de l'Agneau ».

Bossuet dans ses Méditations sur l'Evangile, IIe P., 72e jour, a écrit : « Commençons donc dès cette vie à contempler par la foi la gloire de Jésus-Christ, et à lui devenir semblables en l'imitant. Un jour nous lui serons semblables par l'effusion de sa gloire, et n'aimant en lui que le bonheur de lui ressembler, nous serons enivrés de son amour. Ce sera là la dernière et parfaite consommation de l'œuvre pour lequel Jésus-Christ est venu ».

Ibid., 75e jour : « Jésus dit aux élus: Je suis en eux (JEAN, XVII, 26). Ils sont mes membres vivants, ...d'autres moi-même... Ainsi le Père éternel ne voit en eux que Jésus-Christ, c'est pourquoi il les aime par l'effusion et l'extension du même amour qu'il a pour son Fils. Après quoi il faut se taire avec le Sauveur, et demeurant dans l'étonnement de tant de grandeurs où nous sommes appelés en Jésus-Christ, n'avoir plus d'autre désir que de nous en rendre dignes avec sa grâce ».

En ces âmes unies au Christ, tant qu'elles sont sur la terre, le Saint-Esprit écrit un Evangile spirituel ; il l'écrit non pas avec de l'encre, sur du parchemin mais avec la grâce sur les intelligences et les volontés. Cet évangile spirituel est le complément de celui que nous lisons chaque jour à la Messe. Il s'imprime pendant toute la durée des siècles et il ne sera terminé qu'au dernier jour. C'est l'histoire spirituelle du Corps mystique ; Dieu la connaît de toute éternité, et les bienheureux en voient les lignes essentielles dans l'essence divine. Le Père de Caussade a écrit sur ce sujet des pages admirables, dans son traité de l'Abandon à la Providence.

Au-dessus de tous les saints, Marie au ciel est par tous reconnue et aimée comme la très digne Mère de Dieu, la Mère de la divine grâce, la Vierge puissante, la Mère de Miséricorde, le refuge des pécheurs, la consolatrice des affligés, le secours des chrétiens, la reine des Patriarches, des Prophètes, des Apôtres, des Martyrs, des Confesseurs, des Vierges et de tous les Saints. Cet amour de charité des saints pour Jésus et Marie contemplés en Dieu, in Verbo, se rattache à la béatitude essentielle comme le plus élevé des objets secondaires à l'objet premier.

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CHAPITRE IV - L'AMOUR BÉATIFIQUE ET LA JOIE QUI EN RÉSULTE

L'AMOUR DES SAINTS LES UNS POUR LES AUTRES


Enfin les saints, se voyant les uns les autres en Dieu, s'aiment en lui et pour lui d'une charité mutuelle inamissible. Chacun aime les autres d'autant plus qu'ils sont plus près de Dieu et se réjouit du degré de béatitude que les autres ont reçu.

Mais cependant chacun aime d'une affection spéciale ceux auxquels il a été légitimement uni sur la terre. ( Cf. SAINT THOMAS, IIa, IIae, q. 26, a. 13.)

Les élus forment dans la gloire une immense assemblée depuis les Patriarches, les Prophètes, le Précurseur, saint Joseph, les Apôtres, jusqu'à l'âme des enfants morts peu après leur baptême ( Saint Joseph est le plus élevé de tous après Marie, mais il est souvent nommé après les Patriarches, les Prophètes, le Précurseur, en tant qu'il appartient au Nouveau Testament ; le Précurseur fait la transition.).

En cette assemblée immense, il y a la plus grande variété dans la plus intime unité et la plus grande intensité de vie dans le repos parfait. Les saints, que nous appelons des morts parce qu'ils ont quitté la terre, sont débordants de vie.

Chacun de ces saints a sa mentalité personnelle, chacun est lui-même avec tous les dons naturels et surnaturels qu'il a reçus, pleinement développés.

Saint Paul diffère de saint Jean, saint Augustin de saint François d'Assise, sainte Thérèse de sainte Catherine de Sienne ; mais tous se ressemblent par la contemplation de la même vérité divine et l'amour de Dieu.

Aussi les maîtres de la vie spirituelle nous disent : « Soyez surnaturellement vous-mêmes », en éliminant vos défauts, et l'image de Dieu et de son Fils se formera de plus en plus en vous ; chacun les reproduira à sa manière ; cette unité dans la diversité lorsqu'elle resplendit, c'est le beau, ici le beau spirituel et immortel.

Enfin les bienheureux nous aiment, ils prient particulièrement et incessamment pour ceux qu'ils ont connus ici-bas et d'autant mieux qu'ils ont une plus grande charité. Et comme ils sont si près de la source de tout bien, ils nous comblent de bienfaits. Ils puisent en Dieu pour nous ce que sa bonté veut nous donner. Leur amour pour nous loin d'être diminué, est transformé.

Bien plus tous les saints du ciel nous aiment, ils nous veulent du bien, ceux-là même dont nous ignorons l'existence, car nous sommes avec eux les membres du même corps mystique dont Jésus est la tête.

Nous devons donc aimer ces saints, d'autant que cet amour est une source sûre et abondante de progrès spirituel pour nous. Qui peut dire les fruits qui résultent de l'intimité de grâce qui existe entre nous et tel ou tel saint du ciel que nous sommes portés à imiter ? Et, en eux tous, nous trouvons Notre Seigneur, notre modèle suprême ( cf. MGR CH. GAY. La vie et les vertes chrétiennes, ch. XVII : De l'amour que nous devons à l'Église triomphante.).

L'amour des saints les uns pour les autres se rattache à la béatitude essentielle, car ils se voient et s'aiment en Dieu, in Verbo, comme l'objet secondaire de la vision béatifique et de la charité inamissible. Il en résulte une joie qui provient surtout du bien incréé contemplé dans son rayonnement.

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CHAPITRE IV - L'AMOUR BÉATIFIQUE ET LA JOIE QUI EN RÉSULTE

L'AMOUR DES SAINTS LES UNS POUR LES AUTRES


On lit dans l'Imitation, l. III, ch. 49, n. 6 : « Pensez, mon fils, aux fruits de vos travaux, à leur prompte fin, à leur récompense très grande, et loin de les porter avec douleur, vous y trouverez une puissante consolation.

Pour avoir renoncé maintenant à quelques vaines convoitises, vous ferez éternellement votre volonté dans le Ciel.

Là, tous vos voeux seront accomplis, tous vos désirs satisfaits... Là, votre volonté ne cessant jamais d'être unie à la mienne, vous ne souhaiterez rien hors de moi, rien qui vous soit propre.

Là personne ne vous résistera, personne ne se plaindra de vous, personne ne vous suscitera de contrariétés, mais tout ce qui peut être désiré étant présent à la fois, votre âme, rassasiée pleinement, sera comme plongée dans cette béatitude sans mesure. « Là je donnerai la gloire pour les opprobres soufferts, la joie pour les larmes, pour la dernière place un trône dans mon royaume éternel ». - Ibid., Ch. 58, n. 3

C'est moi, dit le Seigneur, qui ai fait tous les saints, moi qui leur ai donné la grâce, moi qui leur ai distribué la gloire. Je sais les mérites de chacun ; je les ai prévenus de mes plus douces bénédictions. Je les ai connus et aimés avant tous les siècles ; je les ai choisis au milieu du monde (JEAN, XV, 19), et ce ne sont pas eux qui m'ont choisi les premiers. Je les ai appelés par ma grâce ; je les ai attirés par ma Miséricorde, et conduits à travers des tentations diverses.

J'ai répandu en eux d'ineffables consolations, je leur ai donné de persévérer, et j'ai couronné leur patience. Je connais le premier et le dernier, et je les embrasse tous dans mon amour immense. C'est moi qu'on doit louer dans tous mes saints, que j'ai ainsi élevés dans la gloire et prédestinés, sans aucun mérite précédent de leur part... J'ai fait le petit et le grand. Tous ne sont qu'un par le lien de la charité ; ils sont tous unis par le même amour. Ils m'aiment plus qu'ils ne s'aiment. Ravis au-dessus d'eux-mêmes, au-dessus de leur propre amour, ils se perdent dans le mien et s'y reposent délicieusement. Ils ne sauraient détourner leur coeur vers un autre objet ; parce que, remplis de la vérité éternelle, ils brûlent d'une charité qui ne peut s'éteindre... Ils ne se glorifient point de leurs mérites, parce qu'ils ne s'attribuent rien de bon, mais qu'ils attribuent tout à moi, qui leur ai tout donné par une charité infinie. Plus ils sont élevés dans la gloire, plus ils sont humbles en eux-mêmes, et leur humilité me les rend plus chers et les unit plus étroitement à moi. Il est écrit : « Ils se prosternent devant l'Agneau et ils adorent Celui qui vit dans les siècles des siècles ». APOC., IV, 10, V, 14. Humbles, réjouissez-vous ; pauvres, tressaillez d'allégresse parce que le royaume de Dieu est à vous, si vous marchez dans la vérité »

CHAPITRE V - LA BÉATITUDE ACCIDENTELLE ET LA RÉSURRECTION

Nous avons parlé de la béatitude essentielle qui consiste dans la vision immédiate de Dieu et des créatures en Dieu, et dans l'amour qui dérive de cette vision. Le Seigneur qui est riche en Miséricorde, donne largement à ses élus, et, en dehors de la béatitude essentielle, il leur fait trouver une joie dans les biens créés légitimes qui répondent à leurs aspirations. C'est ce qu'on appelle la béatitude accidentelle.

Elle se trouve dans la société des amis ; dans la joie du bien fait sur la terre et de sa récompense spéciale telle l'auréole des vierges, des docteurs ou des martyrs. Elle se trouvera enfin dans la résurrection et les propriétés des corps glorieux.

Source : Livres-mystiques.com

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CHAPITRE V - LA BÉATITUDE ACCIDENTELLE ET LA RÉSURRECTION

LA BÉATITUDE ACCIDENTELLE DE L'AME


Les saints du ciel au sujet de ceux qu'ils ont connus et aimés sur la terre, reçoivent en dehors de la vision béatifique, extra Verbum, des connaissances nouvelles ; c'est pour eux une joie accidentelle très appréciable d'apprendre par exemple le progrès spirituel que tel de leurs protégés fait ici-bas, et de voir entrer au ciel de nouvelles âmes, surtout si elles leur sont particulièrement liées.

Ces connaissances extra Verbum sont inférieures à la vision béatifique et ce sont elles qui sont appelées vision du soir ou du crépuscule par opposition à celle du matin qui fait voir en Dieu les choses créées. ( Il y a entre les deux, nous l'avons dit, une grande différence, tout comme il y en a une très notable entre la connaissance qu'un psychologue acquiert d'une âme par ses paroles et ses écrits, et celle qu'en peut avoir un saint directeur comme un saint François de sales lorsqu'il considère cette âme en Dieu, en priant pour elle dans l'oraison. ) .

De plus chacun des bienheureux est heureux de se voir honoré par Dieu « nimis honorati sunt amici tui, Domine » ( Ps. CXXXVIII, 17.), d'être estimé de ceux qui brillent par leur sagesse. Chacun se réjouit spécialement de voir reconnu et apprécié le bien qu'il a fait ici-bas au milieu souvent de grandes difficultés.

Une récompense spéciale sera accordée pour les victoires privilégiées contre la chair, le monde et le démon : l'auréole des vierges pour la victoire contre la concupiscence de la chair ; l'auréole des martyrs pour la victoire sur les persécuteurs animés par l'esprit du monde ; l'auréole des docteurs pour la victoire sur l'ignorance, l'erreur, l'infidélité, l'hérésie, l'esprit de division et de négation.

Cette auréole sera donnée non pas seulement à ceux qui auront enseigné publiquement la science sacrée par la parole ou par la plume, mais aussi à ceux et à celles qui l'auront fait d'une façon privée quand l'occasion s'en présentait. Cf. DANIEL, XII, 3 : « Ceux qui en auront conduit beaucoup à la justice seront comme des étoiles éternellement et toujours ». ( Cf. SAINT THOMAS, Suppl., q. 96, a. 5-7. )

L'auréole est d'abord dans l'esprit, mais, après la résurrection générale, elle aura, comme la gloire essentielle de l'âme, son reflet sur le corps ressuscité.

LA RÉSURRECTION DE LA CHAIR


A la béatitude accidentelle se rattache aussi la résurrection et les propriétés des corps glorieux ( Cf. SAINT THOMAS, Suppl., q. 75-86.).

La résurrection est un dogme de foi qui fut nié par les Sadducéens, par les Manichéens, les Albigeois, plus tard par les Sociniens, aujourd'hui par les protestants libéraux et les rationalistes.

D'abord il faut nous dire : si un bon nombre de morts comme Lazare, comme le fils de la veuve de Naïm, ont été rappelés à la vie par Notre Seigneur, puis par les Apôtres et par d'autres saints dans la suite, qu'est-ce qui empêcherait que notre âme immortelle, faite par nature pour informer et vivifier son corps, lui soit de nouveau unie pour toujours, et cela d'une façon différente suivant ses mérites ou ses démérites ?

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CHAPITRE V - LA BÉATITUDE ACCIDENTELLE ET LA RÉSURRECTION

LA RÉSURRECTION DE LA CHAIR


Cette vérité révélée est d'ailleurs définie par l'Église et elle a pour elle dans l'Écriture de nombreux témoignages, comme l'explique longuement le Catéchisme du Concile de Trente, Iere p., ch. 12.

Le IVe Concile de Latran a défini : « Tous ressusciteront avec leur propre corps qu'ils ont eu sur terre, pour recevoir ce qu'ils ont mérité selon leurs œuvres bonnes ou mauvaises » ( Cf. Denz. 429 : « Omnes cum suis propriis resurgent corporibus, quae nunc gestant, ut recipiant secundum opera sua, sive bona fuerint sive mala : illi cum diabolo poenam perpetuam, isti cum Christo gloriam sempiternam ».).

La résurrection universelle est de foi. Cette résurrection requiert au moins pour qu'il y ait identité du corps ressuscité, qu'il y ait la même âme individuelle qui informe et vivifie ce corps. Selon certains ( C'est l'opinion de Durand de S. Pourçain reprise par quelques auteurs modernes.), cela suffit, parce que l'âme comme forme substantielle, donne au corps la vie spécifique et jusqu'à l'actualité qui s'appelle la corporéité.

Cependant les théologiens tiennent communément avec saint Thomas que ce doit être aussi le même corps, c'est-à-dire au moins une partie de matière qui a été en lui. Autrement comment pourrait-on dire que chacun ressuscite avec le propre corps qu'il a eu sur la terre » comme dit le IVe Concile de Latran ? Comment pourrait-on dire que ce corps individuel ressuscite ?

Cf. SAINT THOMAS, Suppl., q. 79, a. 1, 2, 3, (ex. IV Sent., d. 44, q. 1, a. 1) : a. 1 : « Si non est idem corpus quod anima resumit, nec dicetur resurrectio, sed magis novi corporis assumptio » - a. 2 : « Oportet quod idem homo numero resurgat ; et hoc quidem fit, dum eadem anima numero eidem corpori numero conjungitur, alias enim non esset resurrectio proprie, nisi idem homo repararetur. » Cf. ibid. a. 3. C. Gentes, IV, c. 80. Tabula aurea, vox: resurrectio, II-12. Cf. E. HUGON Tractatus dogmatici, De novissimis, p. 470. Cependant comme notre organisme sans perdre son identité se renouvelle par assimilation et désassimilation, il suffit qu'une partie de la matière qui a appartenu à notre corps soit réanimée dans le corps ressuscité, pour que l'identité de celui-ci soit assurée.

Par là saint Thomas, C. Gentes, IV, c. 81 répond aux objections qu'on a coutume de faire sur ce point. Les anthropophages se nourrissent sans doute parfois de chair humaine, mais ce n'est pas leur unique aliment. Les plantes dans les cimetières s'assimilent la matière des cadavres en décomposition et ensuite elles servent parfois à l'alimentation d'autres hommes, mais la matière de ces plantes ne provient pas uniquement de ces cadavres. Cf. HERVE, Manuale theol. dogm., t. IV, n° 636. Enfin il n'est pas impossible à l'infinie Sagesse et à la Toute-Puissance de retrouver la matière d'un corps disparu pour ressusciter celui-ci. Cf. MONSABRE, Conférences de Notre-Dame, la Résurrection (1889),p. 218 ss..

Saint Paul dit : « Il faut que ce corps corruptible que j'ai maintenant soit revêtu d'incorruptibilité, que ce corps mortel soit revêtu d'immortalité ». Oportet corruptibile hoc induere incorruptibilitatem, et mortale hoc induere immortalitatem ». I. COR., XV, 53.

Le Catéchisme du Concile de Trente loc. cit. dit à ce sujet : « Chacun de nous ressuscitera avec le corps que nous avons eu sur la terre, et qui aura été corrompu dans le tombeau et réduit en poussière ». Ainsi paraissent l'indiquer l'Écriture et la Tradition.

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CINQUIÈME PARTIE

CHAPITRE V - LA BÉATITUDE ACCIDENTELLE ET LA RÉSURRECTION

LA RÉSURRECTION DE LA CHAIR


Dans l'Ancien Testament, JOB, XIX, 25-27, dit déjà : « Dans ce squelette revêtu de sa peau, dans ma chair, je verrai Dieu; je le verrai moi-même, je le contemplerai de mes propres yeux, moi et non un autre ». - ISAIE, XXVI, 19, annonce : « Que vos morts reviennent à la vie, que leurs cadavres se relèvent ! Réveillez-vous et poussez des cris de joie, vous qui êtes couchés dans la poussière... La terre rendra au jour ses trépassés ». - DANIEL, XII, 12 : « Beaucoup de ceux qui dorment dans la poussière se réveilleront, les uns pour une vie éternelle, les autres pour un opprobre, pour une infâmie éternelle ». Au Livre II des MACCHABÉES, VII, 9, un des martyrs dit à son juge : « Scélérat que tu es, tu m'ôtes la vie présente, mais le Roi de l'univers nous ressuscitera pour une vie éternelle, nous qui mourons pour être fidèles à ses lois. »

Jésus défend la résurrection de la chair contre les Sadducéens, cf. MATTH., V, 29-30; X, 28: « Ne craignez point ceux qui tuent le corps et ne peuvent tuer l'âme ; craignez plutôt celui qui peut perdre l'âme et le corps dans la géhenne ». Ibid., XXII, 23-32 « Quant à la résurrection des morts, n'avez-vous pas lu ce que Dieu vous a dit en ces termes : Je suis le Dieu d'Abraham, le Dieu d'Isaac et le Dieu de Jacob ? Or Dieu n'est pas le Dieu des morts, mais le Dieu des vivants ».

Notre Seigneur est encore plus explicite dans l'Évangile de SAINT JEAN, V, 29 : « L'heure vient où tous ceux qui sont dans les sépulcres entendront sa voix (la voix du Fils de l'homme). Et ils en sortiront, ceux qui auront fait le bien, pour une résurrection de vie ; ceux qui auront fait le mal pour une résurrection de condamnation ». Ibid., VI, 54: « Celui qui mange ma chair et boit mon sang, a la vie éternelle, et moi, je le ressusciterai au dernier jour ».

Saint Paul prouve la possibilité de la résurrection des morts par celle de Notre Seigneur Jésus-Christ. Cf. I. COR., XV, 17 : « Si les morts ne ressuscitent pas, le Christ non plus n'est pas ressuscité, votre foi est vaine, vous êtes encore dans vos péchés. » Ibid., XV, 21-27 : « Puisque par un seul homme est venue la mort, c'est par un homme aussi que vient la résurrection des morts. Et comme tous meurent en Adam, de même tous aussi seront vivifiés par le Christ, mais chacun en son rang... Le dernier ennemi qui sera détruit, c'est la mort... » Le même saint Paul annonce ce mystère devant les Athéniens ( Act. Apost., XVII, 31-32.), devant le gouverneur Félix ( Act. Apost., XXIV, I5, 21. ) et aux Thessaloniciens ( I. THESS., IV, 17.). Voir aussi Apocalypse c. XXI, 4.

Les Pères de l'Église du IIe siècle parlent très explicitement de ce dogme ( Athénagore, Théophile d'Antioche, Tertullien en parlent longuement, de même saint Jean Chrysostome, saint Augustin, saint Grégoire. Cf. ROUET DE JOURNEL, Enchiridion patristicum, index théologicus, n° 598-600 : mortui resurgent, et quidem atones, cum eodem corpore.), et les martyrs l'annoncent en mourant ( Cf. RUINART, Acta Martyrum, p. 70.).

La raison ne peut donner une preuve démonstrative de cette vérité révélée, mais elle en fournit de hautes raisons de convenance. Ces raisons sont prises du côté de l'âme et du corps, puis du côté de Dieu et enfin du côté du Christ. Voici comment elles sont exprimées dans le Catéchisme du Concile de Trente, loc. cit. : « La première est que nos âmes, qui ne sont qu'une partie de nous-mêmes, sont immortelles et conservent toujours leur propension naturelle à s'unir à nos corps ».

C'est que notre intelligence, la dernière de toutes les intelligences, a pour objet propre : la vérité intelligible connue dans le miroir des choses sensibles ; alors elle a normalement besoin du concours de l'imagination, qui n'existe pas actuellement sans un organe, sans le corps.

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CHAPITRE V - LA BÉATITUDE ACCIDENTELLE ET LA RÉSURRECTION

LA RÉSURRECTION DE LA CHAIR


Dès lors il paraîtrait contraire à la nature, qu'elles en fussent séparées à jamais. Or ce qui est contraire à la nature et dans un état de violence, ne peut pas durer toujours. Il est donc de toute convenance que l'âme soit réunie à son corps et que celui-ci ressuscite ( Cf. SAINT THOMAS, C. Gentes, l. IV, c. 79.). L'âme est naturellement forme du corps, c'est pourquoi elle frémit de s'en séparer ; elle ne doit donc pas être privée de lui pour toujours.

Ce que nous venons de dire réfute la métempsychose, selon laquelle une âme humaine passerait d'un corps dans un autre, soit dans un corps de bête, soit dans un autre corps humain ; par exemple l'âme de Pierre dans le corps de Paul. Cela n'est pas possible, car l'âme humaine a une relation essentielle à un corps humain, et non pas à un corps de bête ; de plus cette âme individuelle a par elle-même une relation à ce corps individuel et non pas à un autre.

Ainsi les âmes séparées restent individuées par leur relation à leur propre corps qu'elles réanimeront un jour. Le corps de Pierre a été voulu par Dieu pour l'âme de Pierre, et non pour celle de Paul. C'est le sens profond de l'individualité des âmes et de celle des corps.

« Une seconde raison se tire de la Justice infinie de Dieu, qui a établi en l'autre vie des châtiments pour les méchants et des récompenses pour les bons... Il convient donc que les âmes soient de nouveau unies à leur corps, afin que ces corps qui ont servi d'instruments pour le bien comme pour le mal, partagent avec les âmes les récompenses et les punitions méritées. C'est la pensée que saint Jean Chrysostome a développée avec le plus grand soin dans une homélie au peuple d'Antioche » ( Homil., 49 et 50.).

Chez les méchants le corps a pris part aux oeuvres d'iniquité, et aux voluptés criminelles; chez les bons il a été au service de l'âme dans l'accomplissement des bonnes oeuvres, parfois héroïques, dans le dévouement, l'apostolat, dans les souffrances du martyre.

De plus le corps des justes a été le temple du Saint-Esprit, comme le dit saint Paul. La résurrection du corps est donc hautement convenable pour que rien ne manque à la félicité de l'âme. En cela apparaît avec la justice de Dieu, sa sagesse et sa bonté.

Une troisième raison se tire de ce que la victoire du Christ sur le péché et sur le démon a pour conséquence sa victoire sur la mort, suite du péché. Il a remporté lui-même cette victoire sur la mort par sa propre résurrection et par celle de sa sainte Mère juste avant l'Assomption ; il convient donc, pour qu'il soit le Sauveur de l'humanité, corps et âme, qu'il remporte la victoire définitive sur la mort, par la résurrection universelle.

Le Catéchisme du Concile de Trente a dit à ce sujet, loc. cit. : « Admirable restauration de notre nature dont nous sommes redevables à la victoire de Notre Seigneur Jésus-Christ sur la mort.

La sainte Écriture est formelle sur ce point : Il anéantira la mort à jamais, dit Isaïe en parlant de Jésus-Christ ( Is., XXV, 8.). Osée lui fait dire : « O mort, je serai ta mort » ( OSÉE, XIII, 14. ). Saint Paul en expliquant cette parole, ne craint pas d'affirmer qu'après tous les autres ennemis, la mort même sera détruite » ( I. COR., XV, 26.).

Nous lisons dans saint Jean: « Il n'y aura plus de mort ( APOC., XXI, 4. ) ». Il était en effet de suprême convenance que les mérites de Jésus-Christ, qui ont détruit l'empire de la mort, fussent infiniment plus efficaces et plus puissants que le péché d'Adam ( HEBR., II 14.) .

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CHAPITRE V - LA BÉATITUDE ACCIDENTELLE ET LA RÉSURRECTION

LES PROPRIÉTÉS DES CORPS GLORIEUX


SAINT PAUL, I. COR., XV, 42, dit : « L'éclat des corps célestes est d'une autre nature que celui des corps terrestres : autre est l'éclat du soleil, celui de la lune, celui des étoiles, même une étoile diffère en éclat d'une autre étoile.

Ainsi en est-il pour la résurection des morts. Semé dans la corruption, le corps ressuscite incorruptible ; semé dans l'ignominie, il ressuscite glorieux ; semé dans la faiblesse, il ressuscite plein de force ; semé corps animal, il ressuscite corps spirituel (ou subtil) ».

D'après cette doctrine, les théologiens distinguent quatre qualités principales des corps glorieux : l'impassibilité, la subtilité, l'agilité, la clarté.

L'impassibilité est ce don qui les préservera non seulement de la mort, mais de la douleur (Cf. SAINT THOMAS, Suppl, q. 83, a. 1 ; q. 84, q. 85) ; elle proviendra de la parfaite soumission du corps à l'âme ( De Civ. Dei, l. XI, 10).

L'agilité délivrera le corps du poids qui parfois l'accable dans la vie présente. Il pourra se porter partout où il plaira à l'âme avec une facilité et une vitesse incomparable, comme l'aigle, ainsi que le dit saint Jérôme ( Comm. in Isaiam, c. 40).

La subtilité le rendra capable de pénétrer les autres corps, sans difficulté ; ainsi le corps glorieux du Christ ressuscité rentra au cénacle quoique les portes fussent fermées ( Cf. SAINT THOMAS, Suppl, q. 83).

La clarté donnera au corps des saints cet éclat ou cette splendeur qui est l'essence même du beau. Notre Seigneur dit: « Les justes brilleront comme le soleil dans le royaume de mon Père » ( MATTH., XIII, 14) et pour en donner une idée à trois de ses Apôtres il fut transfiguré devant eux sur le Thabor ( MATTH., XVII, 12).

Saint Paul dit aussi : « Jésus-Christ reformera notre corps vil et abject, en le rendant semblable à son corps glorieux » ( PHIL., III, 21). Les Israélites, dans le désert (EXOD., XXXIV, 20), virent une image de cette gloire sur le front de Moïse, lorsque après avoir vu Dieu et reçu ses paroles, il paru devant eux avec un visage si lumineux que leurs yeux n'en pouvait soutenir l'éclat.

Cette clarté n'est qu'un reflet ou une redondance de la gloire de l'âme sur le corps ( Cf. SAINT THOMAS, Suppl., q. 85, a. 1), et par suite les corps des saints n'auront pas tous le même degré de la lumière de gloire et de la charité qui correspondra à celui de leurs mérites. Aussi saint Paul dit-il, nous l'avons vu, « de même qu'une étoile diffère d'une autre étoile en clarté, ainsi en sera t-il de la résurection des morts » ( I COR., XV, 41).

Enfin nos sens trouveront une très pure et ineffable joie à contempler l'humanité de Jésus, la Bienheureuse Vierge Marie, les corps des saints, toute la beauté du monde renouvelé, et à entendre les chants qui accompagneront le culte d'adoration et d'action de grâces de la cité de Dieu.

Telle sera la béatitude accidentelle du ciel, après la rénovation du monde.

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CHAPITRE V - LA BÉATITUDE ACCIDENTELLE ET LA RÉSURRECTION

LES PROPRIÉTÉS DES CORPS GLORIEUX


ISAIE, LXV, 17 annonce déjà « de nouveaux cieux et une nouvelle terre ». L'APOCALYPSE, XXI, 1 le redit. La IIe Epître de Saint PIERRE, III, 10, l'explique en disant : « Le jour du Seigneur viendra comme un voleur ; en ce jour les cieux passeront avec fracas, les éléments embrasés se dissoudront, et la terre sera consumée avec les ouvrages qu'elle enferme ... Nous attendrons, selon la promesse « de nouveaux cieux et une nouvelle terre » où la justice habite. »

Et d'autre part la science constate dans la robuste constitution du monde les symptômes de la crise qu'il doit subir. Elle découvre dans les profondeurs du firmament les pluies d'astres dont nous sommes menacés ; l'arrêt brusque de mouvements célestes, pourrait par la transformation des forces produire une immense conflagration. Cf. MONSABRE, Conférences de Notre-Dame, 101e Conf., 1889. »

Quels sont dès maintenant pour nous les fruits de la connaissance de ce mystère auquel nous n'avions nullement par nature le droit d'aspirer ? Le Seigneur a daigné « révéler ces choses aux petits, alors qu'il les a cachées aux prudents et aux sages » ( MATTH., XI, 26 ).

Nous devons d'abord en remercier l'infinie Bonté. Nous devons aussi y voir un stimulant pour réprimer les mauvaises passions qui seront châtiées dans le corps et dans l'âme, et pour mener une vie sainte, celle que le Seigneur attend de nous dans les conditions où nous sommes. Ce doit être enfin une consolation pour nous en mourant ou en voyant mourir les nôtres de penser à la résurrection future.

Dans le cours de la vie présente cette même pensée est un réconfort au milieu des peines ; c'est ainsi que Job se consolait de ses malheurs par l'espérance de voir le Seigneur son Dieu au jour de la Résurrection ( JOB., XIX, 26 ). La splendeur qui apparaît parfois sur le visage des saints, comme sur celui de saint Dominique ou de saint François, est le prélude de celle de l'éternité.

L'histoire rapporte que des hérétiques voulurent tuer saint Dominique, et se portèrent sur le chemin où il devait passer à Fanjeaux, mais lorsqu'il arriva une telle lumière rayonnait de ses traits qu'ils n'osèrent pas le toucher ; cette lumière était le rejaillissement sensible de la contemplation qui l'unissait à Dieu, et qui le sauva en sauvant aussi l'Ordre qu'il avait l'intention de fonder..

CHAPITRE VI - LE NOMBRE DES ÉLUS

Bien des ouvrages ont été écrits sur ce sujet, on en trouvera la liste assez complète avec un examen judicieux des raisons qu'ils proposent dans le savant article Elus du Dictionnaire de Théologie Catholique écrit par A. Michel. Nous ne dirons ici que ce qui est certain ou au moins très probable selon la grande majorité des théologiens.

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