L'éternelle vie et la profondeur de l'âme par Fr. Garrigou-L

Postez ici vos intentions de prière.
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amidelamisericorde
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CINQUIÈME PARTIE

CHAPITRE VI - LE NOMBRE DES ÉLUS

LE MYSTÈRE RELATIF AU NOMBRE DES ÉLUS


Le nombre des élus est connu de Dieu : « Le Seigneur connaît ceux qui sont à lui ». II. TIM., II, 19. La liturgie dit même que ce nombre est connu de lui seul ( « Deus cui soli cognitus est numerus electorum superna felicitate locandus ».). C'est ce qu'affirme aussi saint Thomas ( Ia, q. 23, a. 7.). La fin du monde arrivera lorsque ce nombre des élus sera complet et que la suite des générations humaines n'aura plus sa raison d'être.

En lui-même ce nombre est très grand au témoignage de l'APOCALYPSE, VII, 4-9 : « J'entendis le nombre de ceux qui avaient été marqués du sceau (des serviteurs de Dieu), cent quarante quatre mille de toutes les tribus des enfants d'Israël...

Après cela, je vis une foule immense que personne ne pouvait compter, de toute nation, de toute tribu, de tout peuple et de toute langue. Ils étaient debout devant le trône et devant l'Agneau, vêtus de robes blanches et tenant des palmes à la main. »

Est-ce que le nombre des élus est supérieur à celui des réprouvés ?

Si l'on compte les anges et les hommes élus, leur nombre parait supérieur à celui des réprouvés, dit saint Thomas (Ia, q. 63, a. 9 et I. Sent., dist. 39, q. 2, a. 2, ad 4m), car selon le témoignage de l'Écriture et de la Tradition, parmi les anges, dont le nombre est très élevé selon DANIEL, VII, 10, comme celui des étoiles du ciel, la majorité est restée fidèle. De plus dans la nature angélique, dit saint Thomas (Ia, q. 63, a. 9, ad Im), le mal n'arrive que dans la minorité des cas, car l'ange n'ayant ni sens, ni passions, ne court pas risque, comme l'homme, de s'arrêter à une forme de vie inférieure.

Si l'on parle seulement des hommes, nous ne savons pas, si parmi les mondes répandus dans l'espace, la terre seule est habitée. A ne parler que des hommes qui se succèdent sur notre planète, la question du nombre des élus reste controversée.

Bien des Pères et des théologiens inclinent vers le moins grand nombre des élus, parce qu'il est dit dans l'Évangile : « Il y a beaucoup d'appelés, et peu d'élus ». MATTH., XX, 16 ; XXII, 14 ; « Entrez par la porte étroite ; car la porte large et la voie spacieuse conduisent à la perdition et nombreux sont ceux qui y passent ; car elle est étroite la porte et resserrée la voie qui conduit à la vie et il en est peu qui la trouvent ! » MATTH., VII, 14.

Cependant ces textes ne sont pas absolument probants. Après plusieurs autres le Père Monsabré ( Conférences de Notre-Dame : 102e Conférence : le Nombre des élus, P. 253.) remarque : « Si ces paroles ont été dites pour tous les lieux et pour tous les temps, l'opinion du petit nombre des élus triomphe. Mais il est permis de croire qu'elles s'appliquent, surtout et directement, au temps ingrat de la prédication du Sauveur ; et elles ne sont que trop bien justifiées par le peu de fruit de cette prédication. Quand Jésus veut nous faire entrevoir l'avenir, il parle d'une autre manière.

Il dit à ses disciples : « Lorsque je serai élevé de terre, j'attirerai tout à moi » JEAN, XII, 32. « Les puissances de l'enfer ne prévaudront pas contre mon Eglise » MATTH., XVI, 18. Et nous montrant les résultats de son dernier jugement : « Les bons, dit-il, s'en iront dans l'éternelle vie, et les méchants dans l'éternel supplice » MATTH., XXV, 46.

Source : Livres-mystiques.com

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LE MYSTÈRE RELATIF AU NOMBRE DES ÉLUS


Remarquez, je vous prie qu'il ne détermine pas le nombre des bons et des méchants. Son parti est pris de se taire sur ce point ; et à ceux qui lui demandent de se prononcer clairement, par cette question : « Seigneur y en a-t-il peu qui se sauvent ? », il se contente de répondre : « Efforcez-vous d'entrer par la porte étroite ; car beaucoup chercheront à entrer et ne pourront pas » Luc, XIII, 24.

Les rigoristes me diront, peut-être, que Jésus-Christ nous cache ici le mystère de sa justice pour ne pas troubler les âmes timorées ; moi, j'aime mieux penser qu'il nous cache le mystère de sa Miséricorde pour nous faire éviter la présomption ».

L'opinion commune des Pères et des anciens théologiens est sans doute que, parmi les hommes, ceux qui sont sauvés ne représentent pas le plus grand nombre. On cite en faveur de ce sentiment les saints Basile, Jean Chrysostome, Grégoire de Naziance, Hilaire, Ambroise, Jérôme, Augustin, Léon le Grand, Bernard, Thomas d'Aquin ; et plus près de nous Molina, saint Robert Bellarmin, Suarez, Vasquez, Lessius, saint Alphonse. Mais ils ne donnent leur manière de voir que comme une opinion, non pas comme une vérité révélée, ni comme une conclusion certaine.

Au siècle dernier l'opinion contraire « du plus grand nombre des élus, » a été défendue par le Père Faber en Angleterre, Mgr Bougaud en France, le P. Castelein, S. J. en Belgique.

On trouvera l'exposé des raisons pour et contre dans l'article Elus du Dictionnaire de Théol. Cath: les unes insistent sur la Miséricorde, les autres sur la justice. Ni les unes, ni les autres ne donnent une certitude ; ce sont seulement des raisons de convenance, et elles diffèrent beaucoup des raisons de convenance invoquées en faveur d'un dogme déjà certain par la révélation, car il ne s'agit pas ici d'une vérité déjà certaine.

Aussi les théologiens sont généralement inclinés à compléter ce que nous dit l'Écriture et la Tradition par la considération des moyens de salut donnés aux hommes dans l'Église catholique et en dehors du corps de l'Église surtout aux âmes de bonne foi.

S'il s'agit seulement des catholiques, on enseigne communément, surtout depuis Suarez que, même à ne considérer que les adultes, le nombre des élus dépasse celui des réprouvés. Quoique en effet la majeure partie pèche mortellement, ils se relèvent cependant au tribunal de la pénitence, et il y en a relativement peu qui à la fin de la vie ne se repentent pas et refusent de recevoir les sacrements.

S'il s'agit de tous les chrétiens, ou de tous les baptisés, soit catholiques, soit schismatiques, soit protestants, il est plus probable, disent communément les théologiens, que le plus grand nombre est sauvé, en comprenant du moins les adultes et les enfants, car nombreux sont les enfants qui meurent en état de grâce avant l'usage de la raison.

De plus beaucoup de schismatiques et de protestants sont aujourd'hui de bonne foi et ils peuvent se réconcilier avec Dieu par un acte de contrition surtout à l'article de la mort, où la Miséricorde Divine se penche sur eux. Enfin les schismatiques peuvent y être aidés par une absolution valide.

Source : Livres-mystiques.com

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S'il s'agit du genre humain tout entier, la question reste controversée pour les raisons que nous avons dites plus haut. Mais, même si, ici, le nombre des élus est moins grand, la gloire de Dieu, dans son gouvernement n'en souffre pas. La qualité l'emporte sur la quantité ; une seule âme élue est comme un univers spirituel qui a atteint son but ; et nul mal n'arrive sans avoir été permis pour un bien supérieur. De plus, parmi les non chrétiens, qu'ils soient juifs, mahométans ou païens, il y a des élus.

Les juifs et les mahométans non seulement admettent le monothéisme, mais conservent des fragments de la révélation primitive et de la révélation mosaïque ; ils peuvent ainsi croire à un Dieu rémunérateur surnaturel, et avec le secours de la grâce faire un acte de contrition.

Même s'il s'agit de païens qui sont dans l'ignorance invincible ou absolument involontaire de la vraie religion et qui s'efforcent d'observer la loi naturelle, des secours surnaturels leur sont offerts, par les moyens connus de Dieu, pour qu'ils puissent arriver au salut, comme le dit Pie IX, en rappelant que Dieu ne commande jamais l'impossible ( Cf. Denz., 1677 et SAINT AUGUSTIN, De Natura et gratia, c. 43, n° 50.). A celui qui fait ce qui est en son pouvoir, Dieu ne refuse pas sa grâce, comme le disent communément les théologiens.

Quant aux enfants qui meurent avant le baptême et avant l'usage de la raison, à cause du péché originel qui ne leur a pas été remis, ils vont aux limbes, où ils ne souffrent pas, car ils ignorent qu'ils étaient appelés à voir Dieu face à face, ils le connaissent d'une connaissance naturelle et ils ont une certaine béatitude naturelle, (quamdam beatitudinem naturalem) quoiqu'ils n'arrivent pas, à cause du péché originel, à l'amour efficace de Dieu auteur de la nature. Cela montre indirectement le prix et la grandeur du baptême.

Nous ne pouvons arriver à une certitude sur la question : est-ce que le plus grand nombre des hommes est sauvé ? Il vaut mieux reconnaître notre ignorance sur ce point, et éviter de décourager les fidèles par une doctrine trop rigide, ou de les exposer au danger de se perdre par une doctrine trop facile. L'important est d'observer les commandements de Dieu en se rappelant cette grande vérité bien exprimée par saint Augustin ( De Natura et gratia, c. 43, n. 50.) et proclamée par le Concile de Trente (Denz. 804) : « Dieu ne commande pas l'impossible, mais, en donnant ses préceptes, il nous avertit de faire ce que nous pouvons et de lui demander sa grâce pour accomplir ce que nous ne pouvons pas et il nous aide pour que nous le puissions. »

Il faut aussi mettre sa confiance en Jésus-Christ « victime de propitiation pour nos péchés ». I. JOAN., IV, II, en « l'Agneau de Dieu qui efface les péchés du monde » JOAN., I, 29. - « Approchons-nous avec assurance du trône de la grâce pour obtenir Miséricorde et pour être secourus en temps opportun ». HEBR., IV, 16.

Dans ses Méditations sur l'Evangile, dernière partie, 72e jour, au sujet du mystère de la prédestination : « la volonté de mon Père est que je ne perde aucun de ceux qu'il m'a donnés ». JOAN., VI, 39., Bossuet dit : « Pourquoi Jésus nous fait-il entrer dans ces sublimes vérités ? Est-ce pour nous troubler, pour nous alarmer... pour que l'on s'agite soi-même en disant : « Suis-je des élus ou n'en suis-je pas ? » Loin de nous une si funeste pensée, qui nous ferait pénétrer dans les secrets conseils de Dieu, fouiller pour ainsi dire jusque dans son sein, et sonder l'abîme profond de ses décrets éternels.

Source : Livres-mystiques.com

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Le dessein de Notre Sauveur est que, contemplant ce regard secret qu'il jette sur ceux qu'il sait et que son Père lui a donnés par un certain choix et reconnaissant qu'il les sait conduire à leur salut éternel par des moyens qui ne manquent pas, nous apprenions, premièrement à les demander, à nous unir à sa prière, à dire avec lui : « Préservez-nous de tout mal, ou comme parle l'Église : « Ne permettez pas que nous soyons séparés de vous : si notre volonté veut échapper, ne le permettez pas ; tenez-la sous votre main, changez-la ; et la ramenez à vous... Jésus veut nous apprendre aussi à nous abandonner à sa bonté... ; en agissant de tout notre coeur pour notre salut, il faut au-dessus de tout nous abandonner à Dieu seul pour le temps et pour l'éternité ».

LES SIGNES DE LA PRÉDESTINATION

Comme le déclare le Concile de Trente (Denz. 805 et 826) on ne peut avoir sur terre, sans révélation spéciale, la certitude qu'on est prédestiné. Nul parmi les justes, à moins de révélation spéciale, ne sait s'il persévérera dans les bonnes oeuvres et dans la prière.

Y a-t-il pourtant des signes de la prédestination qui donnent une sorte de certitude morale qu'on persévérera ? Les Pères, notamment saint Jean Chrysostome, saint Grégoire le Grand, saint Bernard, saint Anselme, ont, d'après certaines paroles de l'Écriture, indiqué plusieurs signes de la prédestination que les théologiens ont souvent énumérés comme il suit 1° une bonne vie ; 2° le témoignage d'une bonne conscience, pure de fautes graves et prête à la mort plutôt que d'offenser Dieu gravement ; 3° la patience dans les adversités pour l'amour de Dieu ; 4° le goût de la parole de Dieu ; 5° la Miséricorde à l'égard des pauvres ; 6° l'amour des ennemis ; 7° l'humilité ; 8° une dévotion spéciale à la Sainte Vierge à qui nous demandons tous les jours de prier pour nous à l'heure de notre mort.

Parmi ces signes, certains, comme la patience chrétienne dans l'adversité, montrent que l'inégalité des conditions naturelles est parfois compensée et au delà par la grâce divine. C'est ce que disent les béatitudes évangéliques : « Bienheureux les pauvres en esprit, les doux, ceux qui pleurent, ceux qui ont faim et soif de justice, les Miséricordieux, les coeurs purs, les pacifiques, ceux qui souffrent persécution pour la justice, car le royaume des cieux est à eux ». Porter patiemment et longtemps une lourde croix est un grand signe de prédestination.

On a indiqué comme signes très spéciaux : une grande intimité avec Dieu dans l'oraison, la parfaite mortification des passions, le désir ardent de beaucoup souffrir pour la gloire du Christ Jésus, le zèle infatigable pour le salut des âmes.

Nous renvoyons aussi à ce que nous avons dit plus haut, IIIe p. ch. VI, fin p. 181, sur la Grande promesse du Sacré-Coeur à ceux qui feront bien la sainte communion neuf fois de suite le premier Vendredi du mois. Cette promesse, avons-nous dit, est absolue ; cela suppose que bien faire ainsi neuf fois la sainte communion est le fruit d'une grâce qui n'est accordée qu'à des élus.

Le mystère de la prédestination nous rappelle que sans la grâce du Christ « nous ne pouvons rien faire » dans l'ordre du salut : « Sine me nihil potestis facere » a-t-il dit ( JEAN, XV, 5.). « Qu'avons-nous, dit saint Paul, que nous ne l'ayons reçu ? » ( I. COR., IV, 7.).

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LES SIGNES DE LA PRÉDESTINATION


Mais d'autre part la prédestination ne rend pas superflu le travail de la sanctification, car les adultes doivent mériter la vie éternelle ; personne n'ira au ciel s'il n'est mort en état de grâce, et nul n'ira en enfer que par sa faute. Rappelons-nous la parole de saint Paul (ROM., VIII, 17) : « Nous sommes héritiers de Dieu, cohéritiers du Christ, si toutefois nous souffrons avec lui, pour être glorifiés avec lui ».

ÉPILOGUE

La doctrine révélée sur la mort, le jugement particulier, l'enfer, le purgatoire et le ciel nous fait pressentir ce qu'est l'autre vie, et nous manifeste la profondeur de l'âme humaine que Dieu seul vu face à face peut irrésistiblement attirer et combler. Ce qui nous fait tendre vers le ciel, notre destinée, c'est la grâce sanctifiante, germe de la vie éternelle, et les vertus infuses qui dérivent d'elle, surtout la foi, l'espérance et la charité, avec les sept dons du Saint-Esprit.

Notons, en terminant, que ces trois grandes vertus théologales sont parfois complètement défigurées aujourd'hui. La foi en Dieu, l'espérance en Dieu, l'amour de Dieu et des âmes en lui ont été remplacés en bien des milieux modernes par la foi et l'espérance en l'humanité, par l'amour théorique de l'humanité. La phraséologie a pris en ces milieux la place de la doctrine sacrée. L'art de faire des phrases a remplacé la doctrine révélée sur Dieu et sur l'âme. Tout est ainsi irrémédiablement faussé.

Dans certaines loges maçonniques, à la première salle, on lit sur les murs : « Fides, spes, caritas », Chesterton a parlé à ce sujet « des grandes idées devenues folles ».

Ce sont à proprement parler les personnes et non pas les idées, qui, par suite de perturbations physiologiques et psychiques, deviennent folles, et plus ces personnes étaient douées d'une haute intelligence, plus cette folie est affligeante, et prend des proportions qui correspondent à celles de leurs facultés et de leur culture. C'est ainsi que la folie religieuse est la plus difficile à guérir, car on ne peut faire appel, pour la surmonter, à un motif plus élevé ; l'intelligence s'égare en ce qu'elle a de plus haut. Alors elle se trompe habituellement, non pas sur la valeur des objets les plus ordinaires, mais sur celle des idées les plus élevées, sur Dieu, sur ses perfections infinies, sa justice et sa miséricorde.

« Les grandes idées devenues folles » sont des idées religieuses qui ont perdu leur signification supérieure et qui sont complètement désaxées, déséquilibrées. C'est ce qui arrive lorsqu'on substitue à la foi en Dieu qui ne peut ni se tromper ni nous tromper, la foi en l'humanité malgré toutes ses aberrations. Et comme la foi véritable éclairée par les dons du Saint-Esprit, par les dons d'intelligence et de sagesse, est le principe de la contemplation mystique, la foi dégénérée et complètement désaxée devient le principe d'une fausse mystique, dans laquelle on se passionne pour le progrès de l'humanité comme si ce progrès devait être désormais sans recul, bien plus comme si ce progrès était Dieu lui-même qui deviendrait ou se ferait en nous. Quand on demandait à Renan : « Dieu existe-t-il » ? il répondait : « Pas encore » sans bien s'apercevoir que c'était un blasphème.

L'antiquité classique n'a pas connu un déséquilibre si profond. Après elle, est venu le Christianisme, l'élévation surnaturelle de l'Évangile, et lorsqu'on se sépare de lui, la chute est d'autant plus rapide qu'on tombe de plus haut.

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La descente a commencé avec Luther, par la négation du Sacrifice de la Messe, de la valeur de l'absolution sacramentelle et donc de la confession, par la négation aussi de la nécessité d'observer les commandements de Dieu pour être sauvé. La chute s'est accélérée ensuite avec les encyclopédistes et les philosophes du XVIIIe siècle, avec le « christianisme corrompu » de J.-J. Rousseau, qui enlève à l'Évangile son caractère surnaturel, et réduit la religion au sentiment naturel qui se retrouve plus ou moins altéré en toutes les religions. La Révolution française a propagé partout ces idées. A la même époque Kant soutient que la raison spéculative ne peut prouver l'existence de Dieu. Et alors Fichte et Hégel enseignent que Dieu n'existe pas en dehors et au-dessus de l'humanité, mais qu'il se fait en nous et par nous, et qu'il n'est autre que le progrès même de l'humanité, comme si celui-ci n'était pas accompagné de temps à autre d'un effroyable recul vers la barbarie.

Entre le Christianisme et ces erreurs monstrueuses, le libéralisme veut rester à mi-côte, et ne conclut rien, ce qui ne suffit pas pour agir. Dès lors il est remplacé par le radicalisme dans la négation, puis par le socialisme et finalement par le communisme matérialiste et athée, comme le prévoyait Donoso Cortés.

Cf. Œuvres de Donoso Cortes, trad. française, Parie, 2e éd. 1862 : t. II, p. 272 ss. Le principe générateur des plus graves erreurs de nos jours, lettre de trente pages écrite en 1852 pour être présentée à Pie IX. - Discours sur la situation générale de l'Europe (1850), ibid., t. I, p, 399 ss. Item, t. III, p. 279, ss. .

Ce communisme est la négation de Dieu, de la religion, de la famille, de la propriété, de la patrie, et conduit à une servitude universelle par la plus effroyable des dictatures. La descente est accélérée comme la chute des corps.

Pour remonter il n'y a qu'un sérieux commencement de vraie sainteté, mais il importe de considérer celle-ci de façon réaliste.

La sainteté, comme le montre saint Thomas (IIa, IIae, q. 81, a. 8.), a deux caractères essentiels : l'absence de toute souillure ou du péché qui détourne de Dieu, et une très ferme union à Dieu. Cette sainteté est parfaite au ciel, mais elle commence sur la terre. Elle se manifeste concrètement de trois manières sur lesquelles nous voulons insister ici. Il y a en effet trois grands devoirs envers Dieu : nous devons le connaître, l'aimer et le servir, et obtenir ainsi la vie éternelle. Il y a des âmes qui ont surtout pour mission d'aimer Dieu et de le faire beaucoup aimer ; ce sont des âmes de forte volonté, qui reçoivent des grâces d'amour ardent. Il y en a d'autres qui ont pour mission de le faire connaître ; en elles domine manifestement l'intelligence, et elles reçoivent surtout des grâces de lumière. Enfin il y a des âmes qui ont surtout pour mission de servir Dieu par la fidélité au devoir quotidien ; c'est la majorité des bons chrétiens, en qui s'exerce avec la mémoire l'activité pratique par la fidélité au devoir de chaque jour.

Ces trois formes de sainteté semblent représentées en trois Apôtres privilégiés : Pierre, Jean et Jacques.

Les âmes en qui domine la volonté, reçoivent d'assez bonne heure des grâces d'amour ardent. Elles se demandent : Que ferai-je pour Dieu ? quelle oeuvre entreprendre pour sa gloire ? Elles ont soif de souffrir, de se mortifier pour prouver à Dieu leur amour, pour réparer les offenses dont il est l'objet, pour sauver les pécheurs ; c'est secondairement qu'elles s'appliquent à mieux connaître Dieu.

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ÉPILOGUE

A ce groupe appartiennent le prophète Élie, si remarquable par son zèle, saint Pierre si profondément dévoué à Notre Seigneur, et qui par humilité et amour de Jésus voulut être crucifié la tête en bas, les grands martyrs, saint Ignace d'Antioche, saint Laurent. Plus près de nous le séraphique saint François d'Assise, sainte Claire, les Clarisses. Plus tard saint Charles Borromée, saint Vincent de Paul, tout débordant de charité pour le prochain, sainte Marguerite-Marie, saint Benoît-Joseph Labre avec son amour de la croix, le Saint Curé d'Ars.

L'écueil de ces âmes est dans l'énergie de leur volonté, qui peut dégénérer en raideur, ténacité, obstination ; chez les moins ferventes d'entre elles, ce sera leur défaut dominant : un zèle pas assez éclairé, ni assez patient et doux ; et quelquefois elles se donneront trop aux oeuvres actives, aux dépens de l'oraison.

Les épreuves que le Seigneur leur envoie tendent surtout à les assouplir, parfois à briser leur volonté lorsqu'elle est devenue trop raide, pour qu'elle soit pleinement docile sous l'inspiration du Saint-Esprit et pour que leur zèle brûlant soit de plus en plus humble, éclairé, patient et doux. C'est par ce versant qu'elles s'élèvent vers le sommet de la perfection.

Les âmes en qui domine l'intelligence, s'y élèvent par un autre versant. Elles reçoivent d'assez bonne heure des grâces de lumière, qui les portent à la contemplation, à de grandes vues d'ensemble qui font le prix de la sagesse. C'est seulement par la voie de conséquence que leur amour grandit. Elles éprouvent moins que les précédentes le besoin d'agir, ou celui de réparer, mais, si elles sont fidèles, elles parviendront à l'amour héroïque pour ce Dieu qui les ravit.

A ce groupe d'âmes appartiennent les grands Docteurs, saint Augustin, saint Thomas d'Aquin, saint François de Sales, qui gémit de sa lenteur à suivre les lumières qu'il a reçues.

L'écueil de ces âmes est de se contenter de ces lumières, et de ne pas assez y conformer leur conduite. Pendant que leur intelligence est fort éclairée, leur volonté manque d'ardeur.

Ces âmes souffrent surtout de l'erreur, des fausses directions qui égarent les intelligences. Ces épreuves les purifient et lorsqu'elles les supportent bien, elles parviennent à un grand amour de Dieu. Une âme lumineuse fidèle sera plus unie à Dieu qu'une âme ardente infidèle.

Enfin il y a les âmes en qui la faculté dominante est la mémoire et l'activité pratique ; elles ont surtout pour mission de servir Dieu par la fidélité au devoir quotidien. C'est le grand nombre des âmes chrétiennes. Leur mémoire leur rappelle les faits particuliers, elles sont frappées par un trait de la vie d'un saint, par une parole de la liturgie ; l'inspiration divine les rend attentives aux divers moyens de perfection. Si elles sont fidèles, elles peuvent s'élever comme les précédentes aux plus hauts degrés de la sainteté.

A ce groupe d'âmes paraissent appartenir l'Apôtre saint Jacques, les grands pasteurs de l'Église primitive, tout dévoués jusqu'au martyre à la direction de leur diocèse ; et dans les temps modernes, saint Ignace attentif aux moyens les plus pratiques de sanctification et soucieux de considérer les hommes tels qu'ils sont et non pas seulement tels qu'ils devraient être; saint Alphonse de Liguori tout préoccupé lui aussi de morale et d'apostolat pratique dont le besoin se faisait tant sentir pour lutter contre le jansénisme et l'incrédulité.

L'écueil de ces âmes serait de trop s'attacher aux pratiques bonnes en elles-mêmes, mais qui ne conduisent qu'indirectement à Dieu. Les unes mettront toute leur perfection dans les austérités, d'autres dans le dévouement, d'autres dans leurs travaux habituels, quelques-unes dans la récitation d'interminables prières. L'écueil ici est la minutie et les scrupules. Cela peut retarder l'entrée de ces âmes dans la contemplation à laquelle le Seigneur les appelle, et empêcher l'intimité de leur union avec lui. Elles s'attardent à des méthodes et des moyens qui leur ont servi un moment, mais qui plus tard détournent de la contemplation simple et aimante de Dieu.

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ÉPILOGUE


Les épreuves de ces âmes se trouvent surtout dans la pratique de la charité fraternelle et dans l'apostolat, elles ont beaucoup à souffrir des défauts du prochain. Mais si elles sont fidèles au milieu de toutes ces difficultés, elles arrivent elles aussi à une très intime union avec le Seigneur.

Telles sont les trois principales formes de sainteté qui correspondent à nos trois grands devoirs envers Dieu : le connaître, l'aimer, le servir.

Jésus nous a montré l'excellence de ces trois formes de sainteté dans sa vie cachée, dans sa vie apostolique et dans sa vie douloureuse.

Dans sa vie cachée, en la solitude de Nazareth, dans la maison du charpentier, il est l'exemple de la fidélité au devoir quotidien, en des actes extérieurement bien modestes, mais très grands par l'amour qui les inspire, et même d'un prix sans mesure.

Dans sa vie apostolique, il apparaît comme la lumière du monde, et il nous dit : « Celui qui me suit ne marche pas dans les ténèbres, mais recevra la lumière de vie ». JOAN., VIII, 12. Ce qu'il enseigne sur la vie éternelle et les moyens pour y parvenir, il ne le croit pas, il le voit immédiatement dans l'essence divine ( Cf. SAINT THOMAS, IIIa, q. 9, a. 2 ; q. 10).

Il fonde l'Église, la confie à Pierre. Il dit à ses Apôtres : « Vous êtes la lumière du monde ». MATTH., V, 14, et il les envoie enseigner toutes les nations, leur porter le baptême, l'absolution, l'Eucharistie. (MATTH., XVI, r8-i9 ; XVIII, 18) ce qu'il confirme après sa résurrection. (Ibid., XXVIII, 19).

Dans sa vie douloureuse Jésus nous manifeste toute l'ardeur de son amour pour son Père et pour nous. Cet amour le porte jusqu'à mourir pour nous sur la croix, pour réparer l'offense faite à Dieu et sauver les âmes.

Si Jésus possède éminemment ces trois formes de la sainteté, il domine tous les écueils qu'y rencontrent les autres âmes. Il a toute l'ardeur de l'amour, sans raideur, ni ténacité. Jamais son amour ne fut plus ardent que sur la Croix et jamais aussi il ne manifesta une plus grande douceur : « Père, pardonnez-leur, car ils ne savent ce qu'ils font ».

Jésus jouit de la contemplation la plus lumineuse et la plus haute, mais il n'est pas perdu en cette contemplation, il n'est pas abstrait, tiré du monde comme un saint en extase. Jésus est au-dessus de l'extase, et sans cesser de contempler son Père et de lui être très intimement uni, il s'entretient avec ses Apôtres des détails mêmes de leur vie apostolique.

Enfin si Jésus est attentif aux plus petites choses du service de Dieu, il ne court pas risque de trop s'y arrêter en perdant de vue les plus grandes. Il ne cesse de voir tout en Dieu, les choses du temps dans celles de l'éternité.

La sainte âme de Jésus apparaît plus grande lorsqu'on le compare ainsi aux plus grands saints, comme la lumière blanche est supérieure aux sept couleurs de l'arc-en-ciel qui procèdent d'elle. Toute proportion gardée il faut faire la même remarque au sujet de la sainteté éminente de Marie, Mère de Dieu et pleine de grâce.

Ils sont ainsi nos médiateurs, que Dieu nous a donnés à cause de notre faiblesse. Laissons-nous humblement conduire par eux, ils nous mèneront infailliblement à la vie de l'éternité. Déjà la vie de la grâce est la vie éternelle commencée, « inchoatio quaedam vitae aeternae ».

FIN

Source : Livres-mystiques.com

Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
ami de la Miséricorde
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